Anthony LE TALLEC

Poste

Formé au Havre, Anthony Le Tallec, champion du monde des moins de 17 ans en 2001, avait signé, en juin 2002, en même temps que son cousin normand Florent Sinama-Pongolle, un contrat en faveur des Reds de Liverpool version Gérard Houiller. Prêté au Havre lors de la saison 2002-2003 afin qu'il s'aguerrisse, il découvre la D1 à 17 ans et demi et obtient ses premiers gallons de titulaire. Il inscrit son premier but face à Lyon, le 7 novembre 2002.

Pendant l'été 2003, ce natif de Hennebont (Morbihan) franchit définitivement la Manche. Il fait ses premières armes dans le championnat anglais de Première League, le 13 septembre 2003 face à Blackburn. Toutes compétitions confondues, en 2003-2004, il a disputé 23 matches sous le maillot des Reds (titulaires à trois reprises en championnat) et a inscrit un but en Coupe de l'UEFA face à Olimpija Lubiana.

En fait Le Tallec ne s'imposera pas à Saint-Etienne. Au moment où il pouvait gagner sa place, il se blessera sérieusement, ce qui le handicapera pour retrouver un poste de titulaire. Peut-être, n'a-t-il pas été assez gagneur, comptant seulement sur ses qualités techniques qui sont indéniables. Au mercato de janvier 2005, l'arrivée de Lamine Sakho le poussera vers la sortie. Le Tallec retourne donc à Liverpool.

Article paru le 18 octobre 2001 dans "Le Nouvel Observateur"

Anthony le Normand et Florent le Réunionnais font équipe depuis l'âge de 11 ans. Aujourd'hui, leur duo vaut de l'or.
C'est une belle partie d'amitié qu'aimeraient jouer des milliers d'enfants. L'histoire de deux mômes, qui, chacun à un bout du monde, l'un au Havre, l'autre à la Réunion, voulaient par-dessus tout devenir footballeurs. Deux étrangers, devenus frères grâce à une incroyable rencontre. Anthony Le Tallec et Florent Sinama-Pongolle ont réussi ensemble à réaliser leur rêve. Et leur duo d'attaquants vaut déjà de l'or. Les grands clubs européens se les arrachent à coups de millions. Leur victoire en finale du championnat du monde des moins de 17 ans, le 30 septembre à Trinité-et-Tobago, a encore permis de révéler l'étendue de leur talent. Ce jour-là, Anthony, le jeune athlète au regard clair, s'est effondré dans les bras de son copain : « J'ai craqué, je ne pensais jamais en arriver là. Tout a été tellement vite ! »
Pourtant, Anthony comme Florent ont déjà une longue carrière derrière eux. Le père Le Tallec, ancien joueur pro à Lorient devenu postier, inscrit son fils au HAC (Havre Athlétique Club) dès l'âge de 6 ans. Sa femme et lui sont de tous les entraînements, de tous les matchs. Ils voient bien que « le petit est toujours au-dessus du lot », qu'il a tout pour devenir « un grand ». Anthony ouvre la voie à ses deux petits frères, qui suivent bientôt un parcours identique. Au même moment, à Saint-Denis de la Réunion, le père Sinama réalise aussi que son rejeton a le foot dans le sang. Florent est confié tout petit à la JS Saint-Pierroise. Il se distingue déjà par son agilité, sa rapidité et son jeu de jambes.

Les surdoués se croisent une première fois en 1993, lors d'une rencontre entre les deux clubs, sur l'île. Le père Le Tallec est épaté, comme tous les Havrais, par les performances du petit Réunionnais. Il veut connaître son nom : Sinama ! Sinama, comme sa belle-soeur créole qui vit à Hennebont, dans le Morbihan ! Les parents de Florent, ravis, invitent leurs nouveaux cousins à dîner. Les familles se lient d'amitié. L'année suivante, pour la deuxième édition du tournoi, Anthony est reçu chez Florent. Cette fois, le président du HAC a fait le déplacement. Il sait que le FC Nantes aussi a repéré la « petite bombe de la Saint-Pierroise » et qu'il faut faire vite. « C'était un soir vers 23 heures. Mon père et ma mère étaient assis sur le canapé avec un monsieur et plein de papiers. Ils pleuraient, se souvient Florent. Puis ils m'ont annoncé que j'allais devoir les quitter pour ma carrière. » Marie-Jeanne, qui a déjà vu son aîné rejoindre la métropole à 16 ans pour devenir footballeur, laisse son petit partir. Philosophe : « Il y a bien un moment où les oiseaux doivent quitter le nid », elle est aussi rassurée : les Le Tallec ont proposé d'héberger Florent chez eux.

L'enfant des îles débarque dans la brume havraise à 11 ans. Les parents d'Anthony l'accueillent comme un fils. La mère se met au zouk, à la cuisine créole, console aussi les coups de blues. Les deux espoirs du HAC dorment dans la même chambre, portent les mêmes habits, nourrissent les mêmes rêves. Ils s'entraînent ensemble, avec la certitude qu'un jour les efforts paieront. Un an après son arrivée, le petit Sinama rejoint l'internat du centre de formation. Mais il retourne souvent dans sa famille adoptive. Les frères de coeur parfois se disputent ou se jalousent quand l'un progresse trop vite, mais ils ne s'éloignent jamais longtemps. Ces deux-là se complètent à merveille. Florent, le petit brun aux yeux de biche, est tendre et rieur. L'autre, le grand blond, est plus réservé, un « tueur » qui déteste perdre. Le Réunionnais se révèle un talentueux buteur, Anthony un excellent passeur. Le duo fonctionne parfaitement car, sur le terrain, ils ne se comprennent pas, ils se sentent. Luc Bruder, directeur technique de la formation au Havre, les suit depuis leurs débuts : « Ils ont toujours eu une complicité folle. Anthony peut faire une passe à Flo les yeux fermés. Il sait d'avance où il se trouve. » Ensemble, ils accumulent les succès et décrochent leur place en équipe de France dans la catégorie des 13, 15 puis des 17 ans. Les dirigeants du HAC commencent peu à peu à les intégrer à l'équipe pro. Lors de leur seconde apparition, pour le match de la Coupe de la Ligue contre Wasquehal, les deux jeunots se sont même payé le luxe de marquer un but quelques minutes avant la fin.

Tout, pour eux, va désormais très vite. A peine profitent-ils de leur succès qu'ils doivent aussi en affronter les écueils. Les dizaines d'agents, venus de toute l'Europe, qui promettent de leur « faire gagner plein de pognon ». Le flot des flashs et des caméras. Il y a aussi le regard des gens qui change, les nouveaux amis, et les anciens qui demandent à profiter, eux aussi, de leur « belle vie ». Oui, ils peuvent désormais dévaliser les boutiques Adidas, s'acheter la dernière PlayStation et offrir une télé géante à leurs parents mais ils savent aussi que tout reste à faire. Combien de poulains donnés gagnants à 16 ou 17 ans ont rapidement sombré dans l'oubli ?