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Thierry Laurey s'est confié à Poteaux Carrés Source : Site Poteaux Carrés |
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Samedi 2 avril 2016 |
Entraîneur du Gazelec Ajaccio, Thierry Laurey a répondu pendant plus d'une heure aux questions des potonautes avant de recevoir les Verts ce samedi soir pour le compte de la 32e journée de L1. Dans ce premier volet de l'entretien, il replonge avec délectation dans ses souvenirs de joueur stéphanois.
Enfant et adolescent, étais-tu
supporter des Verts ? (Barre transversale)
Bien sûr ! J'avais 12 ans en 1976. Enfant et adolescent j'ai eu deux
idoles. La première vient hélas de nous quitter. Yohan Cruyff était un
joueur fabuleux. Le premier maillot qu'on m'a offert, c'était le sien, celui
de l'Ajax. J'étais également à fond derrière les Verts. Mon autre idole,
c'était Dominique Rocheteau, j'avais son poster dans ma chambre. L'ASSE,
c'est mythique, tout simplement. Je me suis identifié à ce club, il nous a
fait vivre tellement d'émotions !
Tu as joué un match avec les
Bleus contre l'Ecosse le 8 mars 1989 à Hampden Park. Dis-nous la vérité, en
1989, ils étaient toujours carrés les poteaux ? (deadken)
(Rires) Très honnêtement, je n'ai pas fait attention à cela car j'étais
concentré sur beaucoup plus important pour moi. Je n'y ai pas pensé mais ce
match reste un méga souvenir. Il y avait une ambiance extraordinaire et c'était
un match super important des éliminatoires de la Coupe du Monde. Michel
Platini m'a titularisé quand même, ce n'est pas rien ! (rires) Je garde
surtout le goût de la défaite et le doublé de Mo Johnston, pas l'apparence
des poteaux, au risque de te décevoir !
Ce fut ton seul match en équipe de
France. Regrettes-tu de ne pas avoir eu d'autres sélections ? (Aloisio)
Non, j'ai été repris dans le groupe le match suivant, contre la
Yougoslavie. J'étais sur le banc et je ne suis pas rentré. C'est Didier
Deschamps qui est rentré ce jour-là, c'était sa première sélection. Quand
on voit la carrière qu'il a faite derrière, on se dit que c'était
certainement un meilleur choix que Thierry Laurey ! (rires) Ensuite Michel
Platini est reparti sur une nouvelle génération. J'ai encore reçu des pré-convocations
et ensuite j'ai disparu. Contre l'Ecosse, j'ai fait un match correct mais sans
doute pas tout ce qu'il fallait pour mériter d'être titulaire dans cette équipe.
Je n'ai aucun regret, c'était déjà une énorme chance pour moi de me
retrouver-là !
Peux-tu nous rappeler les
conditions de ton arrivée à Sainté en tant que joueur ? (Alcom)
J'avais encore un an de contrat à Sochaux mais j'avais une clause
libératoire. Plusieurs clubs m'ont contacté : le PSG, Montpellier,
Saint-Etienne entre autres. Honnêtement, le club qui me faisait rêver à ce
moment-là, c'était Paris. On avait un deal bien précis, j'étais recruté
pour jouer derrière et non au milieu de terrain. Moi je suis quand même un défenseur
central de formation. Mais ça ne s'est pas passé comme prévu. J'ai joué
plusieurs matches, j'étais dans le groupe, mais il n'y avait aucune confiance
de la part de l'entraîneur Henri Michel et de son staff. Or il s'avère que
Sainté avait très mal débuté le championnat. Les Stéphanois m'ont appelé,
j'avais déjà été en contact avec eux l'intersaison. Même si j'avais
choisi Paris, ça s'était bien passé avec eux. J'ai choisi de signer à
trois ans à l'ASSE. Je me souviens qu'on avait acheté une maison en région
parisienne avec ma femme. On ne l'aura jamais habitée ! (rires) On l'a réservée,
on a fait le prêt, on l'a intégralement équipée. Un jour j'ai dit à ma
femme : "On s'en va !" Elle m'a dit : "Où ?" J'ai dit :
"A Saint-Etienne". Elle m'a dit : "Tu te fous de moi ?!"
Je ne me foutais pas d'elle, on est parti à Sainté et ça s'est très bien
passé !
Que retiens-tu de ta saison de
joueur à l'ASSE ? (Greenwood, Alcom)
Je suis arrivé en octobre 1990, y'avait déjà eu une dizaine de
journées en championnat quand j'ai débarqué à Sainté. J'ai quasiment joué
tous les matches qui restaient, sachant qu'en Coupe on n'est pas allé bien
loin, je crois qu'Auxerre nous a éliminés. Quand je suis arrivé, l'équipe
était dernière, on a fini la saison à la 13e place. J'étais
venu pour jouer au milieu car je savais que la charnière était composée de
Jean-Pierre Cyprien et Sylvain Kastendeuch. Je garde de très bons souvenirs
de ma saison à l'ASSE car il y avait une super ambiance dans le stade comme
dans le groupe, c'était vraiment agréable. Je me suis bien entendu avec la
quasi-totalité des joueurs avec lesquels j'ai évolué là-bas.
Tu as marqué 4 buts lors de tes
27 matches sous le maillot vert. Y en-a-t-il un que tu retiens plus particulièrement
? (Timick)
J'ai marqué en Coupe à Mandelieu et j'ai aussi mis un but
victorieux à Bruno Martini en championnat contre l'AJA. Mais je retiens
surtout les deux autres. Le dernier que j'ai mis, contre Sochaux, je jouais
avant-centre car tous nos attaquants étaient blessés en fin de saison. Rétrospectivement
ça me fait rigoler, je me demande encore aujourd'hui comment j'ai pu me
retrouver numéro 9 en Ligue 1 ! (rires) C'était un match hyper important,
les deux équipes jouaient pour ne pas descendre. Je me souviens que c'était
Franck Sylvestre qui me marquait, un bon pote à moi. J'avais joué deux ans
avec lui, il a halluciné de me voir avant-centre. C'est la première fois de
sa vie qu'il prenait des tacles, faut dire que j'avais un style pas très académique
pour un numéro 9 ! (rires)
Tu as également scoré contre
l'ASNL entraînée à l'époque par Aimé Jacquet (José)
Oui, j'ai marqué ce but dans le Chaudron dès la première minute de
jeu sur un long ballon en profondeur de Sylvain Kastendeuch. Je laisse
retomber le ballon et je frappe en une touche, dans le but c'était Sylvain
Matrisciano, un bon copain à moi, qui était adjoint de Willy Sagnol à
Bordeaux. J'avais fait un gros match, on avait gagné 4-1 et j'étais impliqué
sur les 4 buts. Lors de mes quatre premiers matches en vert, on a fait 3
victoires et un nul. On avait battu Cannes et Monaco à la maison et on avait
fait nul à Toulouse mais on aurait mérité mieux, on avait tapé les
poteaux. Ça avait boosté l'équipe. Attention, ce n'est pas Thierry Laurey
qui avait boosté l'équipe mais l'arrivée d'un nouveau joueur avait remis un
peu de concurrence, de percussion à toute l'équipe. On avait une bonne équipe
d'ailleurs, elle avait juste un problème de confiance.
Le Chaudron, ça représente
quoi pour toi ? (Poteau droit)
Moi j'ai toujours aimé l'ambiance du Chaudron car le public pousse
vraiment son équipe. Mon premier match là-bas, c'était avec Montpellier
lors de la saison 1987-1988. On a perdu 2-1 mais au retour on a gagné 5-0 grâce
à un triplé de Roger Milla. On avait fini la saison en trombe, ça nous
avait permis de gratter Sainté et de finir européen. L'ASSE avait terminé 4e
mais à l'époque cette place n'était pas européenne. Quand tu penses que
cette saison la 6e le sera sans doute…Je suis ensuite retourné
à Geoffroy-Guichard deux fois avec Sochaux. Les deux fois on a gagné !
J'adorais jouer là-bas, surtout avec le maillot vert même si parfois
le public grondait. Je me souviens d'un match qu'on perd 1-4 face à Toulouse.
Lubo avait pourtant marqué en début de match, on a longtemps mené au score
avant d'en prendre quatre dans le dernier quart d'heure ! On avait été
malheureux sur ce match. Je me souviens que je fais une frappe de 25 mètres,
c'est contré dans la surface de réparation, ça part dans la course d'un
attaquant toulousain et ça va au bout. C'est le style de buts qu'on prenait !
Le public est derrière son équipe quand ça fonctionne mais quand ce n'est
pas le cas, il te le fait savoir aussi. C'est logique, hein, attention ! D'une
manière générale, je garde d'excellents souvenirs de mes matches à
Saint-Etienne. Je me souviens qu'on s'entraînait derrière la tribune, à côté
du terrain couvert. J'étais frappé par le monde qu'il y avait aux entraînements.
Les gens étaient toujours très courtois, très sympas. J'aimais beaucoup
leur mentalité, ça me plaisait. Les supporters étaient toujours
respectueux.
Pour quelles raisons n'es-tu pas
resté plus longtemps à Sainté ? (Alcom)
A l'issue de ma première saison, on se sauve, tout se passe bien. On
part en vacances tranquillement, pas de problème. On fait la préparation et
une semaine avant la reprise du championnat, on recrute un joueur à ma place,
Fabrice Mège, sans me donner d'explication. Alors que j'avais fait tous les
matches de préparation, je me retrouve sur le banc. Ce n'était pas
dramatique en soi mais je ne m'y attendais pas. La première journée, on
gagne contre Toulon, je ne rentre pas, ce n'est pas grave. Le deuxième match
on va à Caen, on perd, et je ne rentre toujours pas. Là, je me suis dit
qu'il y avait un problème avec l'entraîneur. Entretemps, Montpellier qui
avait mal démarré son championnat, a fait à peu près la même chose que
Sainté l'année précédente. On m'a contacté pour savoir si j'étais intéressé
par un retour à Montpellier, cette fois-ci pour jouer derrière. Je suis allé
voir le président André Laurent, qui a très bien compris ma
situation. En toute honnêteté, je pense que ça a arrangé l'entraîneur.
Avec le recul, c'est même une évidence pour moi, mais j'aurais préféré
qu'il ait le courage de me le dire en face. Il n'y a pas mort d'homme, on doit
être capable de dire à son joueur qu'il n'entre plus dans les plans.
Christian Sarramagna ne l'a pas fait, c'est comme ça…J'ai donc quitté
Sainté alors que je m'y plaisais et qu'il me restait deux ans de contrat.
Quel est le joueur le plus fort
avec qui tu as joué à Sainté ? (Timick)
Sans hésiter, Lubomir Moravcik. C'était un garçon phénoménal. Ce
que j'adorais chez lui, c'est qu'il avait les deux pieds. Lubo était vraiment
très adroit. Il était dribbleur, il était malin. Il avait toutes les qualités
qu'on aime voir chez un footballeur. Je me rappelle qu'on était parti en
stage l'hiver dans les Alpes. On avait été invité à un match de hockey.
C'est lui qui avait donné le coup d'envoi de ce match et il avait une habileté
terrible au hockey aussi. C'était fantastique, on était tous bluffés. Lubo
avait un sacré talent, il était très fort dans pas mal de sports. Il avait
du caractère mais je trouve que c'était un garçon très gentil. Il avait
beaucoup d'humilité. Il aurait certainement pu jouer dans un top club européen,
sans problème ! Après, il y a des choix qui sont faits... Quand je vois
qu'il a joué à Saint-Etienne qui n'était pas à l'époque un grand
Saint-Etienne… Il faut avoir l'honnêteté de le reconnaître, l'ASSE était
alors un bon club mais pas un top club. Lubo a ensuite joué à Bastia. Bon.
Moi je me dis que Lubo aurait pu jouer dans un grand club italien ou espagnol.
C'était vraiment un très grand joueur !
Dans le deuxième volet du long entretien qu'il a accordé aux potonautes, l'entraîneur du Gazelec Ajaccio Thierry Laurey revient sur son expérience de recruteur à l'ASSE en 2011.
Après avoir joué à l'ASSE d'octobre
1990 à mai 1991, tu es revenu au club en tant que superviseur de mars à
novembre 2011. Peux-tu nous rappeler les circonstances de ton retour ? (Poteau
gauche)
L'été 1991, j'ai quitté Sainté pour Montpellier, où j'ai enchaîné les
saisons. A la fin de ma carrière de joueur, je suis resté au MHSC, où
j'ai occupé diverses fonctions. J'ai notamment entraîné les 16 ans, les 18
ans, la réserve et j'ai également été entraîneur adjoint de l'équipe
première. J'ai ensuite entraîné Sète en National puis Amiens en L2. Après
j'ai eu une longue traversée du désert. Je suis resté au chômage presque
deux ans. Je voulais à tout prix revenir dans le football, avant tout comme
entraîneur. Mais on m'a dit "est-ce que le scouting, le recrutement, ça
pourrait t'intéresser ? " J'ai répondu favorablement, en précisant que
je ne voulais pas faire ça n'importe où. On m'a dit : "C'est
Saint-Etienne qui cherche un scout". Du coup j'ai accepté. J'ai rencontré
Roland Romeyer, ça s'est fait plus ou moins par l'intermédiaire de Stéphane
Tessier, qui était à l'époque le directeur général de l'ASSE.
Ça t'a plu ? Scout toujours ? (Poteau
droit)
Non, je ne suis plus scout ! (rires) Mon métier, c'était entraîneur et ça
l'est devenu. Mais cette expérience a été super enrichissante d'un point de
vue professionnel. D'un point de vue personnel, c'était un peu compliqué car
il fallait que j'habite à Saint-Etienne. J'étais logé à l'Etrat, je voyais
ma femme au mieux tous les quinze jours. C'était parfois un peu compliqué,
il m'est arrivé de l'emmener avec moi quand j'allais en Suisse ou pas trop
loin ou en France. Ça ne faisait pas de problème, ma femme m'accompagnait
parfois pour qu'on puisse passer du temps ensemble. Je pense que j'aurais pu
faire le même travail en restant chez moi mais bon, ce n'est pas un problème.
En quoi consistait précisément
ton travail ? (Barre transversale)
J'étais en relation directe avec l'équipe professionnelle. Je
devais aller voir des matches à droite à gauche pour scouter des joueurs,
faire des rapports sur des éléments potentiellement intéressants pour le
club. J'établissais mon programme, je le faisais valider ou pas par
Christophe. Il me disait : "OK, pas de problème!" Parfois il me
glissait des infos : "On m'a parlé de tel joueur, est-ce que tu pourrais
aller jeter un coup d'œil." Il avait confiance en moi, dans ce que je
pouvais lui dire. On était en phase, c'était plutôt bien. Quelquefois c'était
même le président ou Dominique qui me sollicitaient en me disant : "On
m'a parlé d'un tel, peux-tu aller le voir ?" C'était mon rôle, du coup
j'ai avalé les kilomètres.
Plus de 45 000 km en voiture,
sans compter les trajets en train et en avion selon un reportage paru le
13 septembre 2011 dans France Football. Tu avais notamment
supervisé à plusieurs reprises Paulao. Avec le recul, tu ne te dis pas que
t'aurais mieux fait de rester chez toi mater des matches en streaming pour
tenter de choper les nouveaux Alex et Aloisio ? (José)
Non mais attends, moi je reste persuadé que Paulao était une très
bonne affaire ! Un joueur qui fait une finale de Ligue Europa, ce n'est pas un
pingouin ! Faut pas rêver ! Christophe pourrait t'expliquer un peu plus en détail
le pourquoi du comment. Paulao ne s'est pas adapté à Saint-Etienne mais ce
n'est certainement pas un problème sportif. Surtout pas ! Moi je te le dis,
des défenseurs comme Paulao, j'aurais aimé en avoir plus d'un dans ma carrière
! Honnêtement ! Il y a eu d'autres choses qui sont rentrées en ligne de
compte, malheureusement. Des choses qu'on ne maîtrise pas forcément avec des
joueurs étrangers. Quand tu vas chercher un joueur étranger, il faut que le
joueur fasse tout pour s'adapter. Mais il faut aussi que les gens qui
l'accueillent fassent tout pour l'intégrer, c'est important ! Attention, je
ne suis pas en train de dire que Sainté n'a pas fait ce qu'il fallait ! Mais
c'est quelque chose que j'ai retenu.
Les joueurs qu'on a fait venir avaient le niveau pour jouer à l'ASSE,
sans problème. Ils pouvaient apporter un plus à l'équipe. Malheureusement
avec Paulao la greffe n'a pas tout à fait pris. Moi je l'ai vu jouer en
championnat du Portugal, c'était plus que correct. Je l'ai surtout vu jouer
en Europa League. Quand tu joues en quart de finale ou en demi-finale de
l'Europa League, tu n'es pas un pingouin ! Surtout quand tu vas en finale avec
une équipe comme Braga et que tu élimines Benfica, une équipe qu'on voit en
Champions League régulièrement. Je me souviens qu'il avait pris
l'avant-centre paraguayen Oscar Cardozo, un super joueur. Et ben il l'a mis
sous l'éteignoir ! Voilà quoi, je ne vais pas faire trois jours sur Paulao
mais pour moi c'était un très bon joueur.
Quels sont les autres joueurs
que tu as supervisés ayant signé à Sainté ? (Brakhow)
Il y avait Banel Nicolita. Je suis bien sûr allé le voir en
Roumanie. C'était un joueur correct. Quand il a signé chez nous, on savait
les qualités et les défauts qu'il avait. Cela correspondait à ce que l'on
pouvait mettre. Et puis il y a eu Max-Alain Gradel que j'ai supervisé
plusieurs fois à Leeds. C'est vrai que lui a été une réussite par rapport
à Paulao. Le recrutement n'est pas une science exacte. Parfois il y a des réussites,
parfois il y a des échecs. Pour en revenir à Paulao, il faut savoir une
chose : on l'a eu gratuit. Il était en fin de contrat. Banel Nicolita, c'est
un joueur qui était capitaine de l'équipe du Steaua Bucarest et de l'équipe
de Roumanie, il a couté seulement 700 000 euros. A un moment donné, il faut
aussi tenir compte du facteur financier, on ne l'a pas payé 5 M€ ! A l'époque
où je faisais partie de la cellule de recrutement de l'ASSE, le club n'avait
pas de gros moyens. Si on devait recruter quelqu'un, la barrière était fixée
à 2 M€, 2,5 M€ grand max ! Aujourd'hui, le club est capable de mettre 6
M€ sur un joueur, on l'a vu avec Robert Beric. J'aurais aimé pouvoir mettre
une telle somme pour un joueur mais ce n'était pas le cas. Quand tu es
recruteur, il faut faire avec les moyens qu'on te donne et essayer d'être
malin comme dirait Christophe.
Dans le cadre de tes déplacements,
tu regardais combien de matches par semaine ? (Aloisio)
Beaucoup ! (rires) Il m'est arrivé plusieurs fois d'enchaîner un
match le jeudi soir en Europa League, notamment en Belgique et en Suisse. Le
vendredi j'allais voir un match de Ligue 2. Le samedi je me faisais deux
matches en Belgique, aux Pays-Bas en Suisse ou au Portugal. Au Portugal aussi.
Le dimanche, il m'arrivait de voir trois matches. Aux Pays-Bas par exemple, il
y a des matches à midi et à 16h00, du coup ça me laissait le temps d'en
voir un troisième. Le lundi, je voyais souvent un match de Ligue 2. Du coup
rentrais souvent à Sainté le mardi midi. Voilà, c'est assez simple mais ça
fait des heures, il faut y passer du temps.
Maintenant tu peux l'avouer.
Lynel Kitambala et Steed Malebranque, c'est toi ? (José)
Absolument pas ! Il y a des moments où je validais des joueurs en
disant "il a telles qualités, tels défauts, il pourrait jouer chez
nous". Parfois ça ne s'est pas fait, pour des raisons sportives ou budgétaires,
il faut être honnête. Je ne citerai pas les joueurs, ça ne ferait pas
avancer le schmilblick ! Quelques fois il y a des noms que je n'ai pas donnés
de joueurs qui n'ont pas signé. Heureusement d'ailleurs ! Moi j'étais juste
un pion en fait. Mais c'était génial car ça m'a permis de rencontrer
beaucoup de personnes du football, beaucoup de recruteurs d'autres clubs. Il
m'est arrivé de rentrer dans certains stades avec les invitations d'un autre
club. Une fois je suis arrivé à un match au dernier moment en pensant que
pourrais rentrer. Je ne pouvais pas rentrer mais le mec de l'Ajax m'a reconnu.
En plus il parlait français, c'est vachement sympa. Il y a des connexions,
des relations qui s'établissent avec des gens qui sont contents de te revoir.
Ce sont des gens sympas pour la plupart, on fait tous le même métier. La
concurrence existe mais pas entre nous, c'est plutôt une concurrence entre
les clubs. Chacun fait son boulot. Sur certains matches, il y a 10, 12 ou 15
personnes qui sont là comme toi en train de faire le même boulot de scout.
Mais chacun ne vient pas forcément superviser les mêmes joueurs. On a des échanges
intéressants.
As-tu attiré au Gaz des joueurs
que t'avais supervisé pour Sainté ? (Poteau gauche)
Pas des joueurs que j'avais supervisés pour l'ASSE mais des joueurs
que j'avais remarqués en allant superviser d'autres joueurs pour
Saint-Etienne. Jacques Zoua par exemple, je l'ai vu à Bâle. Je suis allé
plusieurs fois à Bâle dans le cadre de mes missions de scout. Je me souviens
d'un match - j'étais malade comme une bête ce jour-là – où Jacques Zoua
m'avait tapé dans l'œil. Il était très jeune à l'époque, il arrivait du
Cameroun. C'était un supersub. L'attaquant tunisien Amine Chermiti, qui nous
a rejoints au Gazelec ce mercato d'hiver, je l'avais vu évoluer avec le FC
Zurich. Mais je ne l'avais pas supervisé pour Saint-Etienne. Pour être honnête,
ce n'est pas le même niveau : au Gazelec, tu n'as pas les moyens de cibler
les mêmes joueurs qu'un club aussi riche que Sainté !
Quand tu étais recruteur à
Sainté, as-tu rendu des avis favorables sur des joueurs qui n'ont pas signé
à l'ASSE mais ont explosé depuis ? (Poteau droit)
Non, pas spécialement. Il y en a bien un, mais il était très cher.
Il était largement au-dessus de nos moyens de l'époque. Il a bien marché
l'année dernière à Wolfsburg. C'est Bas Dost, un grand attaquant néerlandais
qui comme Oussama Tananne a joué à Heracles Almelo. Il avait 22 ans et
jouait à Heerenven quand je l'ai supervisé. Wolfsburg a mis pas mal d'argent
sur lui en 2012. Il a eu du mal au début là-bas, mais il a marqué un paquet
de buts la saison dernière en Bundesliga. C'est un attaquant un peu dans le même
style qu'Alexander Soderlund mais beaucoup plus cher. C'était un pari à
faire.
Si tu devais choisir un joueur de l'équipe
actuelle de Sainté pour renforcer ton équipe, lequel prendrais-tu ? (Huracan,
cedric 26)
Le joueur qui serait parfait pour notre équipe, ce serait bien sûr
Loïc Perrin. Moi j'adore ce joueur. C'est l'un des meilleurs défenseurs français.
Il est certes de temps en temps rattrapé par des petites blessures mais pour
moi c'est un top joueur. En plus il est l'âme du club. Il est excellent. On
voit que sa qualité de milieu de terrain ressort derrière. Il ressort les
ballons proprement, il est serein dans ses relances, il va assez vite. Il a
une aura sur ses partenaires. C'est en plus un garçon qui marque des buts.
A l'inverse, quel joueur de ton
effectif selon toi aurait les capacités pour jouer à l'ASSE ? (Huracan,
cedric26)
Aucune idée. Je ne sais pas. J'ignore de quoi Saint-Etienne a besoin
aujourd'hui. J'ai des garçons qui ont le potentiel, certainement. Mais il
faut être honnête, il n'y en a pas 50 car les deux clubs ne boxent pas dans
la même catégorie. Jacques Zoua est un international camerounais intéressant.
Dans une équipe où il y aurait un peu plus de qualités qu'au Gazelec, il
pourrait peut-être tirer son épingle du jeu. Il a joué à Bâle, à
Hambourg. Il est encore jeune, il n'a que 24 ans et demi. Je pense qu'il a
encore une marge de progression et qu'il pourrait éventuellement postuler.
Après, de là à dire que c'est un garçon qui sera titulaire indicutable
dans une équipe du niveau de Saint-Etienne, je n'en suis pas là !
Un autre joueur de mon effectif avait le niveau et aurait pu rejoindre l'ASSE.
Je peux en parler maintenant car il y a prescription. A l'époque où j'étais
scout à Sainté, on avait fait le forcing pour faire venir Greg Pujol.
Finalement il avait préféré signer à Valenciennes, il avait prolongé là-bas.
C'est un garçon qui était en pleine force de l'âge il y a quatre ou cinq
ans. Aujourd'hui il a 36 ans, il a quelques petites blessures. Son profil
plaisait beaucoup à Christophe car c'est un garçon qui fait jouer les
autres.
Je comprends qu'à Saint-Etienne on veuille avoir beaucoup d'infos, connaître
tout. Mais à des moments on fait des choses qui sont plus liées aux moyens,
au contexte. Parfois on fait aussi des choses dans l'urgence. Aujourd'hui l'ASSE
a clairement une surface financière supérieure à celle d'il y a quatre ou
cinq ans. Le club a gagné un trophée, s'est installé dans le top 5, enchaîne
les saisons européennes. Sainté a un vécu, une expérience supérieure. Résultat
des courses : Saint-Etienne est aujourd'hui un club qui fait rêver. Je ne dis
pas qu'il ne faisait pas rêver avant. Mais il fait encore plus rêver
aujourd'hui avec les résultats.
Troisième et avant-dernier volet du long entretien que le gazier Thierry Laurey a accordé aux potonautes avant de retrouver les Verts ce samedi soir à Mezzavia...
Que penses-tu de l'évolution de Kévin
Mayi ? Que lui manque-t-il pour être plus régulièrement titularisé ? (Parasar)
Il lui manque un peu d'expérience, tout simplement. Kevin, c'est un
garçon qui se pose des questions quand, quelquefois, il n'y a pas besoin de
s'en poser. C'est un garçon qui a un gros potentiel, de la vitesse, de la
puissance, qui marque des buts. Pas 20 buts par saison, mais il marque des
buts, ce n'est pas un garçon qui ne marque pas. Après, nous on l'a
repositionné un peu. A Sainté, c'est vrai que c'était plutôt un attaquant
axial, et, chez nous, il joue plutôt sur un côté. C'est quelque chose qu'il
doit aussi gérer. Quelquefois, quand on joue à deux attaquants, il lui
arrive de jouer devant, ce n'est pas le problème. Mais c'est vrai qu'il
progresse, il progresse tout simplement. On aimerait toujours voir les gens
progresser plus vite, mais il progresse à son rythme, c'est le plus
important.
Peux-tu le comparer à Idriss Saadi,
autre attaquant n'ayant pas réussi à s'imposer dans son club formateur ?
(José)
J'ai eu la chance d'avoir les deux. Idriss, je l'ai eu aussi à
Ajaccio : quand je suis arrivé en Ligue 2, c'est lui qui était
avant-centre de l'équipe. On a d'ailleurs gardé d'excellentes relations.
Idriss, c'est plus le buteur, mais c'est aussi un garçon de profondeur. Quand
je suis arrivé, j'ai coaché l'équipe 13 fois en Ligue 2, il a marqué 7
buts au total, et j'ai rarement vu un attaquant se créer autant d'occasions.
Si ce garçon avait eu un peu plus d'expérience à ce moment-là, il aurait
marqué, sans problème, une quinzaine de buts en Ligue 2. On n'a pas été
surpris de voir qu'après, à Clermont, il a marqué 11 buts la première
moitié de la saison 2014-2015. S'il ne s'était pas fait les croisés, il
aurait pu en mettre beaucoup d'autres. C'est vrai qu'à Cardiff, ça ne se
passe pas super bien, donc c'est un problème pour lui. Mon directeur sportif
a gardé des contacts avec lui, comme il a gardé des contacts avec beaucoup
d'anciens joueurs. Idriss c'est une perle, un garçon extraordinaire avec un
très bon état d'esprit. Il était venu pour bosser, c'est ce qui était intéressant
avec lui.
As-tu apprécié de travailler avec
Yoann Andreu ? Les supporters du Gaz lui en veulent d'avoir quitté quitter le
club pour le SCO. Et toi ? (Aloisio)
Yoann Andreu, je vais être très clair là-dessus, je ne lui en veux
pas d'être parti dans un autre club. C'est plutôt la façon dont ça s'est
passé qui me dérange un peu. Pour être honnête, Yoann, je l'ai vu alors
qu'on était sûr de monter en Ligue 1 à l'avant-dernière journée, après
notre match contre Niort. Il y avait un dernier match à Valenciennes. Comme
je savais déjà qu'il y aurait un suspendu pour la 1ère journée du
championnat de Ligue 1, et que lui avait déjà deux cartons jaunes, je lui ai
dit : "Yoann, on va te mettre au repos, on va faire tourner et
cela va te permettre de ne pas redémarrer la saison avec une suspension. Ça
nous permet de faire tourner et de te préserver, il avait une petite douleur
en plus. Je veux te garder l'année prochaine et démarrer la saison avec
toi." Il accepte sans problème et me dit de ne pas m'inquiéter. Ça
signifiait implicitement que je voulais le garder pour la saison d'après.
J'aurais préféré qu'il me dise qu'il ne voulait pas rester. Entre temps, il
a des contacts avec Angers et il signe au SCO. Moi, ce que j'attendais au
minimum, c'était un petit coup de fil pour m'informer qu'il signait à
Angers. Ça fait partie du jeu c'est la règle du jeu, moi, ça ne me pose
aucun problème. Il me passait un coup de fil, et puis, voilà, c'était fait.
On s'expliquait, il n'y avait absolument rien, il voulait aller ailleurs, il
m'avait prévenu, ce n'était pas un problème. Ça a été le cas avec un
autre joueur qui nous a quittés, enfin, qui devait nous quitter. Il m'a appelé,
on a bu un verre, on s'est expliqué, et ça s'est très bien passé. A
un moment donné, il faut avoir l'honnêteté, vis-à-vis des gens qui vous
font confiance, d'expliquer les choses tout simplement. Quand un joueur ne
joue pas, il réclame souvent des explications à son entraîneur. L’entraîneur
peut aussi, de temps en temps, demander des explications. Ça va dans les deux
sens.
J'avais un peu de doute au départ quand il nous a rejoints. On me l'avait
proposé quand j'étais à Arles-Avignon. C'est un garçon qui avait eu des
blessures assez sérieuses à Saint-Étienne, donc j'avais un doute. Et puis,
finalement, quand on me l'a proposé à Ajaccio, j'ai regardé et j'ai vu que
l'année précédente, à Mouscron, il avait beaucoup joué, donc je me suis
dit que cela ne devrait pas poser de problème. Résultat des courses, il a
signé chez nous et a fait deux très bonnes saisons, que ce soit en National
ou en Ligue 2. Et ce qu'il lui arrive aujourd'hui, c'est mérité tout
simplement !
Deux clubs pros pour une ville
d'à peine 70 000 habitants, ce n'est pas un de trop ? Si l'on met de côté
les différences (historiques , politiques , culturelles) , que penserais tu
d'une fusion éventuelle entre le Gaz et l'ACA ? Cette fusion a-t-elle déjà
évoquée ou alors les antagonismes sont si profonds qu'ils interdisent cette
éventualité ? (merlin)
Je pense qu'on est plutôt dans la deuxième hypothèse. Moi,
personnellement, venant du continent, ça ne me pose aucun problème, ce n'est
pas le souci, mais c'est vrai, qu'ici, les gens ont une forte identité.
Chacun a ses couleurs, voilà, tout simplement. Après, je vais te dire, on a
même une équipe de volley qui vient de gagner la Coupe de France. Donc, voilà,
il n'y a pas qu'au niveau du foot : le volley marche bien, c'est une équipe
qu'il faut soutenir. Chacun a sa politique. A un moment donné, c'est vrai que
c'était l'ACA qui marchait bien, ils étaient en Ligue 1 et ça fonctionnait
bien pour eux. Aujourd'hui, c'est nous, tout simplement. C'est difficile parce
que les choses sont plus compliquées qu'on ne le pense.
La qualité de la vie en Corse
est-elle attirante pour un joueur ? Joues-tu là-dessus quand tu convoites un
joueur pour le faire signer au Gaz ? (hcatteau)
C'est évident ! On a quand même quelques munitions, de temps en
temps, sans vouloir faire un jeu de mots, quelques arguments à mettre en
valeur quand on fait signer un joueur. On a un joueur qu'on a fait signer :
on l'a invité 48 heures avec sa femme et ses enfants. On lui a dit :
"Écoute, tu viens chez nous, tu vois comment ça se passe et si ça te
convient, tu prends ta décision, mais au moins tu auras vu exactement."
Ça s'est passé et il a signé chez nous. Honnêtement, je n'ai rien contre
certaines villes du Nord de la France ou de l'Est ou d'ailleurs, mais il vaut
mieux être au bord des plages que dans certains endroits où la pluie ou le
froid vous transpercent à chaque fois. C'est vrai qu'on vient pour jouer au
football, mais quand tu es en Ligue 1, même si tu t'appelles le Gazelec, et
qu'on te propose de signer, tu réfléchis quand même. Surtout que la Corse
ce n'est pas toujours ce que l'on en dit sur le continent. Moi, ça fait un
peu plus de trois ans que je suis là maintenant et je n'ai pas vu de méga
problème. Mais il faut dire ce qui est, le foot, on est un peu en dehors de
tout ça et les Corses sont assez sportifs dans l'âme. Ils aiment bien le
sport et sont passionnés, surtout par le football et forcément, ce sont
toujours les bons côtés qui ressortent plutôt qu'autre chose.
Tu as joué une saison aux côtés
de Galette à l'OM. Quels souvenirs gardes-tu du joueur ? Pensais-tu à l'époque
qu'il allait faire carrière en tant qu'entraîneur ? (Poteau gauche)
Non ! (Rires) C'était un très bon joueur. Ça, c'est une vérité,
c'était un garçon qui avait beaucoup de qualités. Il n'était pas
Marseillais par hasard, Galette avait du sang, comme on dit, il ne se laissait
pas marcher sur les pieds. Mais c'était un gentil garçon, je me rappelle,
avec ma femme on a mangé plusieurs fois avec lui et son épouse. C'était
vraiment un bon mec dans le vestiaire. Après, de là à dire qu'il allait
faire une carrière d’entraîneur… Je ne sais pas si lui se posait même
la question à l'époque parce que c'était quelqu'un qui prenait vraiment la
vie du bon côté, qui manquait peut-être un peu de rigueur par moments. Il
fallait être tout le temps derrière lui, enfin les cadres, parce que, moi,
j'étais un jeune joueur à l'époque. Donc les cadres étaient toujours derrière
nous à nous booster. Ce n'est pas forcément l'idée première que j'avais de
Christophe en me disant, qu'un jour ou l'autre, il allait être l'entraîneur
d'un grand club et que ça allait super bien marcher pour lui. Pas parce qu'on
ne pensait pas qu'il avait la capacité, mais parce que, quand on le voyait au
quotidien, ce n'était pas ce qui nous venait à l'esprit.
Je suis très content de sa réussite parce que j'ai vu comment il travaillait
à Saint-Étienne. Il bosse avec rigueur, c'est une très bonne chose pour lui
et pour Saint-Étienne qu'il y ait eu un couple qui se soit trouvé. Parfois
c'est compliqué. C'est la première équipe qu'il prenait en tant que
numéro un. Quelquefois, c'est important le premier choix, il faut que ça se
passe bien. Là, ça s'est bien passé, il a sauvé l'équipe, ensuite, on lui
a laissé un peu plus les coudées franches et il a montré qu'il était
capable de gérer un grand club. Je trouverais même logique, qu'un jour ou
l'autre, il puisse se retrouver dans un club encore avec un budget supérieur.
Tu as joué avec Laurent Blanc
à Montpellier ainsi que chez les Bleus lors de ta seule sélection.
Saviez-vous déjà que le boulot de coach vous intéresserait un jour ? En
parliez-vous ensemble à l'époque ? (Timick)
Non, pas spécialement. Laurent, c'est pareil, c'est un garçon, pour
qui, au départ, comme aujourd'hui, heureusement d’ailleurs, c'était le jeu
pour le jeu. Je ne vais pas dire que c'est un idéaliste, loin de là, mais c'était
un garçon qui jouait au football pour le football, pour le jeu. Après, il
avait des qualités au-dessus de la moyenne, bien entendu. La seule chose,
c'est que l'année où je l'ai côtoyé à Montpellier, il avait eu pas mal de
petites blessures qui l'avaient contrarié. Il avait joué un peu moins, mais
c'était un super joueur. A l'époque, il jouait milieu de terrain. C'est après
que je suis parti de Montpellier, que Michel Mézy, quand il gagne la Coupe de
France, l'a remis derrière.
Ta vocation d'entraîneur
est-elle venue très tôt ? Quels entraîneurs t'ont inspiré en tant que
coach ? (Poteau droit)
Oui, ma vocation d'entraîneur est venue assez tôt. Il fallait être
majeur pour passer les diplômes, donc j'ai passé ça dès que j'ai pu, à 18
ans. Après, j'ai passé mon DEF pendant mes vacances de footballeur
professionnel, mais ça ne posait pas de problème. Pendant que les autres étaient
aux Bahamas, moi, j'étais à Clairefontaine, c'était un choix. Mais il y a
beaucoup de personnes qui l'ont fait, je ne suis pas unique, il ne faut pas rêver
! Après, il y a des entraîneurs qui m'ont inspiré et dont j'ai gardé
certaines habitudes, certains préceptes. Il y en a d'autres pour lesquels je
me suis juré de ne jamais faire ce qu'ils faisaient. Ceux-là, tu ne m'en
voudras, je préfère ne pas en parler ! (rires) Un entraîneur qui m'a
particulièrement inspiré, c'est Sylvester Takac, à Sochaux. C'était
quelqu'un de très rigoureux qui n'hésitait pas à dire les choses en face
aux joueurs. Quelquefois ça pouvait être déplaisant mais on savait que c'était
honnête. Tout simplement. C'était des choses dites avec beaucoup d’honnêteté,
d'objectivité, jamais de façon négative. C'était avant tout pour te faire
progresser, quelquefois c'était même pour te piquer un peu, parce que tu
pouvais faire des matches qui n'étaient pas à la hauteur de ce qu'il
attendait. Forcément, à ce moment-là, il était dans son rôle
d'essayer de te piquer un peu pour améliorer ton rendement. Vraiment j'ai
gardé un excellent souvenir de lui alors que c'était quelqu'un, à la base,
d'assez rigide et d'assez dur.
Qu'as-tu appris au contact de
Robert Nouzaret ? Es-tu resté proche de lui ? (Poteau gauche)
Je ne suis plus en contact avec Robert parce qu'on a eu un gros différend
à Arles-Avignon. Jusqu'alors, je lui faisais totalement confiance. Mais à
Arles-Avignon, il y a eu quelques incidents diplomatiques, on va dire... A
partir de là nos vies se sont séparées, voilà, tout simplement ! C'est
quelqu'un que j'avais apprécié en tant que manager. C'était quelqu'un de
rigoureux. Quand j'étais à Saint-Etienne et que je suis parti à
Montpellier, c'est lui qui m'avait aidé. Je n'avais aucune raison de douter
de tout ce qu'il faisait, mais malheureusement, on n'a pas pu fonctionner
correctement à Arles-Avignon. Il y avait un contexte assez particulier dans
ce club, mais s'il y a eu des tensions, il en est l'un des instigateurs.
Dans ce quatrième et dernier volet du long entretien qu'il a accordé aux potonautes, Thierry Laurey donne son avis sur Christophe Galtier avant de se projeter sur le match qui opposera le Gazelec à l'ASSE ce samedi soir à Mezzavia.
Comment juges-tu
Christophe Galtier en tant que coach ? (Sempre Sainté)
Christophe, c'est un meneur. Il gère très bien son groupe. Il protège
ses joueurs et il sait les piquer quand ça s'avère nécessaire. Il fait en
sorte que tous les joueurs soient concernés, qu'ils adhèrent à son projet.
Et ça marche ! Christophe c'est aussi un gros bosseur. Il a réussi à faire
progresser le club, à l'installer dans le top 5 depuis plusieurs années. Ses
résultats parlent pour lui ! Christophe est également un entraîneur qui
sait se remettre en question, tenter quelques petits coups tactiques.
Christophe est endurant, il a une longévité qui est quand même
extraordinaire au niveau de la Ligue 1 ! Le CFC a rappelé récemment que
c'est l'entraîneur de l'élite qui est en poste depuis le plus longtemps.
Cela fait plus de six ans maintenant. Il devance Gourvennec, sachant que
Jocelyn avait pris l'équipe de Guingamp en National. Quand tu montes une équipe
en Ligue 2 puis en Ligue 1, ça te redonne de la longévité. Mais rester six
ans de suite en Ligue 1 avec la pression, dans un gros club comme
Saint-Etienne, c'est très fort !
Aimé Jacquet
avait déclaré à France Football quand il était à Bordeaux : "un
entraîneur ne doit pas rester plus de 6 ou 7 ans dans le même club pour
rester crédible, percutant, pour se renouveler, se remettre en cause."
Vois-tu Galette rester à l'ASSE la saison prochaine ? (Sempre Sainté)
Je ne sais absolument pas si Christophe restera à l'ASSE la saison
prochaine. Je sais juste qu'il avait prolongé son contrat en juin dernier
jusqu'en 2018. Je souhaite pour Saint-Etienne qu'il reste, même si je pense
que c'est un garçon qui est capable d'aller manager un gros club à l'étranger
ou en France, peu importe. Si Saint-Etienne veut et met les moyens pour
devenir ce grand club, il restera peut-être. Si Saint-Etienne n'a pas cette
capacité, il ira ailleurs. Sincèrement, je ne me prononce pas. Je te réponds
avec des arguments un peu bateau, parce que je n'ai pas tous les éléments.
Quand on a déjà fait 6 ans, c'est difficile. Je pense qu'il a amené le club
a un niveau qui est plus qu'intéressant.
Est-ce que le club va avoir la possibilité de lui proposer un nouveau
challenge ? La possibilité c'est de devenir le deuxième club français parce
que Paris c'est quand même largement au-dessus pour l'instant. Est-ce qu'ils
vont donner les moyens à Christophe de pouvoir concurrencer Monaco et Lyon ?
Quand je dis concurrencer, c'est régulièrement, sur la durée de plusieurs
championnats. Sur un match Sainté peut déjà concurrencer bien sûr toutes
les équipes. Ce sera sûrement dans sa réflexion. Tout ce que je peux noter,
c'est que certes il n'est pas tout seul - il a un staff, des dirigeants, il a
les joueurs, le public aussi, les partenaires. Il y a toute une histoire -
mais les résultats, ça ne se fait pas en claquant des doigts. Il y a
beaucoup de travail derrière tout ça. Je suis admiratif du travail que
Christophe a fait à Saint-Etienne. J'ai eu la chance en plus de le voir
travailler.
Quels sont tes
futurs projets personnels en tant que coach ? (GuiPlatini) Rêverais-tu
d'entraîner Sainté ? (Poteau gauche)
Qui ne rêverait pas d'entraîner un club comme Saint-Etienne ?
Mon ambition aujourd'hui c'est de maintenir le club en Ligue 1 et ce ne sera
pas un moindre exploit parce qu'on part de très loin. Si on arrive à
se maintenir, ce sera quasiment du jamais vu car notre budget ne dépasse pas
14 M€. Il y a des clubs de Ligue 2 qui ont un budget supérieur au nôtre.
C'est quand même assez compliqué. Je n'ai aucune volonté personnelle de
partir cette année. Si j'ai une offre, je l'étudierai. On se mettra autour
d'une table, on verra si c'est envisageable ou pas. Si ça ne se fait pas, je
resterai à Ajaccio si les dirigeants veulent bien encore de moi.
J'ai passé 21 mois au chômage, avant d'aller à Saint-Etienne, et je dirais
que ça m'a apporté un certain recul. Aujourd'hui je suis content de ce qu'il
m'arrive. C'est ce que j'ai toujours voulu vivre. Mais je n'en suis pas à me
gratter le nombril tous les matins devant la glace. Le football c'est très aléatoire.
Ce n'est pas parce que vous n'avez pas les résultats ou que vous êtes viré
d'un club que vous êtes un peintre. Il y a des conjonctures, des choses qui
s'additionnent et qui fonctionnent, et quelques fois, avec plus de moyens,
plus de capacités, on n'arrive pas à faire fonctionner la chose… Parfois
une année ça marche, et l'autre pas. Parfois une même méthode fonctionne
dans un club et pas dans un autre. Il y a beaucoup de choses qui entrent en
lice, on travaille beaucoup sur l'humain mais malheureusement la nature
humaine n'est pas toujours régulière.
Que penses-tu
de l'ASSE cette saison ? (GuiPlatini, Sempre Sainté)
L'ASSE fait une bonne voire une très bonne saison. Quand on cumule
le championnat qu'ils sont en train de faire, les matchs de coupe de France -
ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient faire, malheureusement ils sont encore
tombés sur Paris - et en plus les matchs d'Europa Ligue, je trouve que c'est
plus que convenable ! Franchement, c'est très bien ! Après, c'est une
nouvelle chose pour eux que de jouer tous ces matchs, il faut enchaîner, il y
a un turnover à mettre en place. Quand on tourne, on ne sait jamais trop
comment va se comporter l'équipe. Au-delà de l'état d'esprit, il y a quand
même des relations entre les joueurs quelques fois. Si on veut ajouter de la
fraîcheur, c'est parfois au détriment de l'équipe et de l'unité du jeu. Ce
sont des choses qu'ils ont dû appréhender cette année. Le championnat n'est
pas terminé et il reste sept matchs. Il y a encore beaucoup de points à
prendre. Ils sont capables de grimper plus haut dans le classement.
Comment vois-tu
la fin de saison de l'ASSE ? (Sempre Sainté)
Je pense que les Verts peuvent finir dans les 4 ou les 5 premiers,
bien sûr. La deuxième place, ça va être chaud ! La troisième place aussi,
ça risque d'être compliqué d'aller la chercher car les Verts sont
actuellement à 5 points du podium. Mais ce n'est pas inenvisageable pour les
Stéphanois, qui misent certainement sur les deux prochains matches pour
combler une bonne partie de ce retard. Ils viennent chez nous, ils reçoivent
Troyes, des matchs qui pour eux sont peut-être plus abordables que d'autres.
Le championnat est encore long, il reste encore 7 matches. Il y a suffisamment
de points en jeu pour pouvoir s'en sortir. Je leur souhaite de garder cette
dynamique. Finir dans les 5 premiers quand on a joué l'Europa Ligue de manière
très performante, et qu'on a joué aussi la Coupe de France avec un niveau
plutôt intéressant, ce ne serait pas rien ! Ce serait une très belle
performance pour les Verts. En tout cas ils font le nécessaire pour bien
figurer sur tous les tableaux. Après, forcément, il y a une certaine fatigue
qui s'installe quand tu joues 7 ou 8 matchs tous les 3-4 jours, il y a
quelques blessés, quelques suspendus, forcément c'est un peu plus compliqué
Je pense que samedi
c'est un match charnière, un tournant pour les deux équipes. Thierry, Laurey
grave, non ? (Alcom, Moufles, Italiaspana, Briko, José)
Oui, c'est un tournant pour les deux équipes, forcément ! C'est
vrai que si on l'emporte ça nous donne la possibilité de sortir la tête de
l'eau. Si les Verts l'emportent, ça renforce leur position dans la course à
l'Europe. Quand tu vas chez le 18ème et qu'ensuite tu reçois le 20ème,
tu es en droit de penser qu'il faut faire 6 points. Ce n'est pas aussi facile
que de regarder le classement quand ça se passe sur le terrain. Mais je
comprends fort bien que Saint-Etienne prenne ces deux matches comme un
tournant parce que ça peut leur permettre, en tenant compte du fait que
certaines équipes puissent lâcher quelques points devant, de recoller au
classement. Après ça, il leur restera 5 matchs, un mois de compétition.
C'est la dernière ligne droite, le sprint final, à eux de faire le travail !
Mais ce qui est sûr c'est qu'on ne va rien leur donner ! C'est une évidence
parce que pour nous ce match est également très d'important. On a 7 matchs
à jouer. Si on veut avoir une chance de s'en sortir, il faut qu'on en gagne
au moins 2 voire 3. On a 4 matchs à la maison : Saint-Etienne, Bastia,
Lille, et Paris, c'est du lourd à chaque fois. Il faut qu'on gagne le
maximum, tout simplement.
Disposeras-tu
de tout ton effectif pour cette rencontre ? Certains joueurs sont-ils
suspendus, forfaits ou incertains ? (Poteau gauche)
On a un joueur suspendu, c'est Lemoigne. Du côté de Saint-Etienne,
je sais que Sall est suspendu lui aussi. Je ferai le point dès leur retour
avec mes quatre joueurs africains qui viennent de disputer des matches dans le
cadre des éliminatoires de la CAN 2017 : Mohamed Larbi (Tunisie), Khalid
Boutaïb (Maroc), Jacques Zoua (Cameroun) et Issiaga Sylla (Guinée). Amos
Youga doit rentrer normalement donc on va retrouver un effectif un peu plus
consistant.
Quels sont les
points faibles du Gaz, là où il faut appuyer pour que Sainté gagne samedi
soir match ? (Riquet le Vert)
(Rires) Tout dépendra de l'équipe de Saint-Etienne. Tu sais, chaque
match est différent, chaque match à son histoire. Le tout c'est de savoir
bien l'écrire. Si on fait des fautes, forcément on paye. Et inversement, si
l'adversaire fait des fautes, ça peut nous permettre de passer devant, tous
simplement ! On est capable de perdre contre Troyes chez nous comme on est
capable de battre Caen ou Lyon chez nous. On a manqué de régularité, c'est
aussi ce qui fait que aujourd'hui on est dans une situation délicate.
On a mal géré certains matchs à la maison contre des concurrents directs.
On fait match nul à Toulouse en prenant un but à la 92ème, on a fait match
nul chez nous contre Guingamp 0 à 0 alors qu'ils étaient à 10 au bout de 10
minutes, on n'a pas été capable de marquer le petit but qui aurait fait la
différence. On a perdu chez nous contre Troyes, ils font 3 tirs cadrés, ils
marquent 3 buts. Il y a pas mal de points qui se sont envolés sur ces
rencontres avec des concurrents directs. C'est ce que je disais tout à
l'heure, on n'a pas bien vécu l'histoire du match. On a manqué d'efficacité.
Sur un match de football, que ce soit Troyes ou Sainté en face,
la réalité c'est la même. Si tu as des occases il faut les mettre, et il
faut en concéder le minimum pour que l'adversaire ne puisse pas marquer, tout
simplement ! C'est vrai qu'on a manqué d'efficacité en janvier-février. Ça
avait déjà commencé par un match nul contre Monaco. Et sur le match de
Reims à la maison, ça a commencé à être un peu plus difficile même si on
aurait dû l'emporter. Résultat des courses, on s'est retrouvé en difficulté
dernièrement avec 4 points de retard sur le premier non relégable, on a réussi
à revenir, et on est à égalité aujourd'hui. Ça prouve que le mental est là.
On a des garçons qui ne lâchent rien. A la maison, il y a le public qui nous
pousse, c'est une force pour nous ! On espère qu'il viendra nombreux, et pas
seulement pour le match contre le PSG… On espère que notre public nous
poussera parce que sur les 4 matchs à la maison qu'il reste, il faudra
prendre un maximum de points.
La défaite à
Sainté au match aller fut la dernière avant le début d'une excellente série
pour ton équipe. S'est-il passé quelque chose ce soir-là à
Geoffroy-Guichard qui a pu créer un déclic pour ton groupe ? (my-color-is-green)
Il s'est passé quelque chose non pas ce soir-là mais dans la
semaine qui a suivi. Quand j'ai regardé le match, j'ai trouvé que c'était
un match sérieux, parce qu'on avait cherché à respecter le plan de jeu,
mais on avait été inoffensif. On s'est dit qu'il fallait qu'on trouve autre
chose. C'est à partir de là qu'on est passé en losange et qu'on a essayé
de trouver des solutions. On s'est dit que si on voulait prendre des points,
il fallait gagner, et pour gagner des matchs, il fallait marquer des buts. On
a rien inventé mais c'est ce qui a fait le déclic. Contre Nice ça
c'est bien passé. Par la suite, on a réussi à prendre des points. Ce match
aller à Geoffroy-Guichard, ça avait été presque un non match, on avait
pris un but sur un coup de pied arrêté qui ne ressemblait à rien. On
ne peut pas dire que St Etienne s'était créé des tonnes d'occasions mais on
avait été trop gentil !
On te propose de
remettre ça samedi à Mezzavia du coup : tu nous laisses gagner et ensuite t'enquilles
une série qui sauve le Gaz, OK ? (José)
Je crois qu'on n'a pas le même programme après Saint-Etienne que
lors du match aller. Ça reste un peu plus compliqué. Si je peux être sûr
de prendre les 3 points contre Saint-Etienne d'abord, je me dis qu'il y en
aura moins à prendre après. On a quand même des gros matchs sur la fin de
saison : on va devoir aller à Angers, à Lyon. On reçoit Paris, Lille,
Bastia aussi. Ce derby va être chaud car on avait gagné chez eux, ils vont
vouloir prendre leur revanche. Il va falloir qu'on prenne des points
rapidement. Sur la dernière séquence de jeu, on a perdu à Nice mais
auparavant on avait fait des résultats plutôt intéressants.