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Ghislain PRINTANT devient l'adjoint de Jean-Louis GASSET
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Samedi 23 décembre 2017 Ghislain Printant, fan de l'ASSE |
L'ASSE se montpelliérise de plus en plus ! Selon la dernière édition du Progrès, Ghislain Printant a signé un contrat d’un an et demi avec l'ASSE hier soir. L'ancien entraîneur de Bastia sera l'adjoint de Jean-Louis Gasset, Julien Sablé restant dans le staff. Par contre Razik Nedder, qui avait été appelé par Julien Sablé , retourne exclusivement auprès des U17 Nationaux.
Communiqué du site officiel
Un accord a été conclu ce samedi entre l’AS Saint-Etienne et Ghislain
Printant, lequel vient renforcer, comme entraîneur adjoint, le
staff technique du groupe professionnel désormais dirigé par Jean-Louis
Gasset.
C’est Aimé Jacquet, ancien Vert et ambassadeur à vie de l’ASSE, qui a
lancé sa carrière d’éducateur. Ghislain Printant n’a que 28 ans lorsque
le sélectionneur champion du monde, alors entraîneur de Montpellier, propose
à cet ancien gardien de but, devenu éducateur, d’intégrer l’encadrement
technique de l’équipe héraultaise. Jusqu’en 2004, Ghislain Printant
occupe plusieurs postes au sein du MHSC : entraîneur adjoint, formateur,
responsable des U17 nationaux et de l’équipe réserve. En 2010, il rejoint
le SC Bastia où il prend la direction du centre de formation.
Nommé entraîneur principal du club corse en novembre 2014, Ghislain
Printant réussit l’exploit de sauver de la relégation l’équipe
professionnelle, 19e de Ligue 1 à son arrivée, mais aussi de la
qualifier pour la finale de la Coupe de la Ligue, perdue contre le
Paris-Saint-Germain.
En janvier 2017, il est nommé entraîneur adjoint de Jean-Louis Gasset, qui a
repris les commandes du MHSC. Le duo se voit confier la mission de maintenir
en Ligue 1 Montpellier, 15e du championnat avec un point d’avance sur le
premier club relégable. Complémentaires, Jean-Louis Gasset et Ghislain
Printant atteignent leur objectif quatre mois plus tard.
Apprécié pour ses qualités humaines, son expertise technique et son expérience,
Ghislain Printant participera à la reprise de l’entraînement des Verts
programmée le samedi 30 décembre prochain.
Son portrait
Ghislain Printant, né le 13 mai 1961 à Montpellier.
Ghislain Printant commence le football à l'ASPTT Montpellier en 1971 puis rejoint, en 1975, les rangs juniors du Montpellier PSC dont son père est membre du comité directeur. Il quitte le club en 1982 et termine sa très modeste carrière de footballeur, disputée au poste de gardien de but, au sein du club du PI Vendargues, dans la banlieue de Montpellier. En 1984, tout en continuant à jouer en amateur dans le club vendarguois, il retourne au Montpellier PSC pour s'occuper des gardiens de l'école de football. L'année suivante, il dirige également en même temps l'école de football du PI Vendargues, et ce jusqu'en 1989.
En 1989, à 28 ans, il rejoint l'équipe première du Montpellier HSC comme entraîneur des gardiens. Il occupe ce poste jusqu'en 1992 où il rejoint le Marvejols Sports comme entraîneur. Sous ses ordres, l'équipe lozérienne remporte la promotion d'honneur A et remporte la Coupe de Lozère en fin de saison. Après deux ans dans ce club, il revient en 1994 dans le club montpelliérain pour de nouveau s'occuper des gardiens. Entraîneur des moins de 16 ans de 2004 à 2006, il devient ensuite entraîneur de l'équipe réserve en Championnat de France amateur. Il quitte le club en fin de saison 2010 sur une descente de l'équipe réserve en CFA2.
En 2010, il devient directeur de la formation du Sporting Club de Bastia. Il est nommé, en novembre 2014, entraîneur de l'équipe première, en Ligue 1, à la place de Claude Makelele. Son équipe, qui lutte pour son maintien dans l'élite, se qualifie pour la finale de la Coupe de la Ligue. Début mars 2015, il est interdit de conférence de presse par la LFP car il lui manque son diplôme d'entraîneur. Il reçoit ainsi de nombreux soutiens comme celui de l'entraîneur de St-Étienne, Christophe Galtier. Considéré par beaucoup de supporters Corses comme le sauveur depuis qu'il a repris la tête de l'équipe, Ghislain Printant a même été jusqu'à recevoir 5 voix aux élections départementales fin mars 2015. Le 28 janvier 2016, Ghislain Printant est limogé par le SC Bastia, François Ciccolini lui succède sur le banc.
Le 30 janvier 2017, il revient au Montpellier HSC où il est chargé par le président Louis Nicollin de réaliser un état des lieux du club avec Jean-Louis Gasset, à la suite de la mise à l'écart de l'entraîneur Frédéric Hantz. Il devient cependant adjoint de Jean-Louis Gasset après la nomination de ce dernier à la tête de l'équipe pour 2 ans et demi. Après avoir réussi à maintenir le club en Ligue 1, ils quittent tous les deux le club et sont remplacés par Michel Der Zakarian et son adjoint Franck Rizzetto.
Il devient l'entraîneur adjoint de l'AS Saint-Étienne le 23 décembre 2017 pour épauler Jean-Louis Gasset nommé 3 jours plus tôt entraîneur principal en remplacement de Julien Sablé, qui avait lui-même remplacé Oscar Garcia un pois plus tôt.
Interview dans So Foot (avril 2006) : Printant apprécie Gasset
Nommé une nouvelle fois adjoint de Jean-Louis Gasset, Ghislain Printant connaît et apprécie l'actuel entraîneur des Verts depuis très longtemps, comme l'attestent ces extraits d'une interview parue en avril 2006 sur le site de So Foot.
"A Montpellier, je me suis lié d’amitié avec Jean-Louis Gasset qui, à l’époque, était l’entraîneur de l’équipe réserve. Et Gasset, qui me voyait travailler, m’a dit : "Tu peux pas venir pour les gardiens du centre ? " J’étais passionné, donc sur mes congés, à la reprise du centre, je l’ai fait. Pendant un mois, ça me permettait de vivre comme si je ne faisais que du football. Mais je continuais à travailler à la clinique.
A Montpellier, j'ai été l’adjoint de Jean-Louis, quand Jean-Louis a été remplacé par Michel Mézy et le jour où Jean-Louis est parti, il m’avait dit : "Toi, il faut que tu manges, continue." Mézy, Nouzaret, Gasset, à Montpelllier, sur le banc, c’était un éternel recommencement !
Quand on était adjoints tous les deux de Mézy, on a partagé pendant des années la même chambre. Jean-Louis, c’est un passionné, un connaisseur, il respire le football. Et puis il est d’agréable compagnie, c’est un bon vivant. Passer une soirée avec Jean-Louis, ce sont des bons moments. Ce garçon a un charisme et un humour extraordinaire, il gagne à être connu. Sur le terrain, il est capable d’enjoliver un exercice, d’amener une pointe de fraîcheur sudiste, je dirais. C’est un chambreur. Nous, les sudistes, de façon générale, on est chambreurs. En Corse, ils appellent ça la " magagne ".
Même quand j'étais à la tête de Bastia, j'appelais Jean-Louis. Sur les conseils qu’il a pu me donner, sur tous les messages qu’il me transmet, je sens de la sincérité. Je pense qu’il était heureux pour moi, comme moi je suis fier de l’avoir accompagné et de voir tout ce qu’il entreprend. Je veux pas être prétentieux, mais je crois que les gens avec qui j’ai travaillé, que ce soit Michel Mézy, Henryk Kasperczak, Aimé Jacquet ou Jean-Louis Gasset, ils ont vu qu’il y avait un travailleur à côté d’eux, un passionné comme eux et surtout, quelqu’un de fidèle, loyal. Il y a toujours quelque chose à apprendre de ces gens-là. Moi, je suis une éponge. Avec eux, je parlerais football du lever au coucher. Ces échanges sont vachement importants, constructifs."
La réaction de Robert Nouzaret
Robert Nouzaret nous a livré ses impressions après avoir appris la nomination de Ghislain Printant au poste d'entraîneur adjoint de Jean-Louis Gasset.
"J'ai côtoyé Ghislain Printant à Montpellier même si je n'ai pas été amené à collaborer avec lui comme j'ai pu le faire avec Jean-Louis Gasset. Tous les deux se connaissent bien, ils veulent constituer un duo de confiance pour ne pas perdre de temps et essayer de réaliser le même coup qu'ils ont réalisé la saison passée à Montpellier. Ce binôme est une assurance tout risque. Ghislain est un gars qui à mon avis n'était pas fait pour ça, mais la situation de Bastia l'a obligé à prendre des responsabilités de professionnel. Il ne s'en est pas trop mal tiré, et maintenant je pense qu'il est beaucoup plus motivé pour s'occuper des pros que du centre de formation. Si Jean-Louis le prend, c'est qu'il a confiance en lui et qu'il est compétent, y'a aucun souci. Je pense qu'ils vont réussir leur mission et que l'ASSE va se maintenir. Il faudra l'appui du public, Saint-Etienne aura besoin des supporters pour gagner des matches. Il faut que le public fasse abstraction de tous ses états d'âme. Il n'y a qu'une chose qui compte, c'est sauver le club, ne pas descendre.
Jean-Louis et Ghislain sont deux gars compétents et surtout très travailleurs, ils correspondent bien à le mentalité stéphanoise donc il ne devrait pas y avoir de problème. Julien Sablé avait été nommé entraîneur numéro un du fait de son passé de Stéphanois mais c'était peut-être un peu trop tôt. Initialement je pensais que c'était un bon choix car je pensais que sa motivation et son expérience du milieu stéphanois allaient lui permettre de mettre les joueurs vers lui. Peut-être que les joueurs ont eu des doutes sur lui du fait de son inexpérience et n'ont pas joué tout à fait le jeu. Là ils vont avoir à faire à deux hommes expérimentés, ça va être beaucoup plus efficace pour la suite du championnat. Julien va apprendre à leurs côtés et cette expérience pourrait lui servir plus tard. Parce qu'on ne sait pas si Jean-Louis Gasset sera encore l'entraîneur stéphanois la saison prochaine. Même s'il aura encore une année de contrat, il quittera très probablement le club si Laurent Blanc retrouve un poste l'été prochain. Je pense que les dirigeants stéphanois sont au courant."
Sa relation avec Jean-Louis Gasset
Le 19 février dernier, juste avant d'affronter... les Verts, Ghislain Printant avait parlé de sa relation avec Jean-Louis Gasset dans Le Midi Libre. Extraits.
"Alors que j'étais à l'Allianz
Arena avec mon fils pour assister à Nice-Guingamp, j'ai reçu un appel de
Jean-Louis qui m'a proposé de l'accompagner au MHSC. Il ne m'a pas fallu
longtemps pour accepter. Retrouver les terrains constituait déjà une telle
bouffée d'oxygène pour moi... Mais le faire chez moi, à Montpellier et avec
un ami de trente ans, comment aurais-je pu refuser ?
Si j'ai été supris ? Plus que ça,
interloqué ! J'étais allé voir Jean-Louis trois jours auparavant car après
le drame qui venait de le frapper [ndp2 : décès de sa femme], il
avait besoin de soutien. Nous avons parlé de son épouse, de ses enfants, de
la vie, de football aussi, mais jamais du MHSC. J'étais d'ailleurs à mille
lieues de penser que la situation allait bouger aussi vite à Montpellier.
Nous avons partagé tellement de choses. Cela a commencé dans les années
80 où je faisais la préparation des gardiens quand Jean-Louis entraînait la
réserve du MHSC. Nous avons ensuite été adjoints ensemble. Nous avons la même
philosophie du football, ce besoin de faire progresser et de transmettre. En
plus, nous parlons le même langage. Au quotidien, cela profite d'ailleurs au
groupe.
Contrairement à ce que l'on pense
parfois, lorsque intervient un changement d'entraîneur, les joueurs prennent
un coup sur la tête car ils savent que la responsabilité leur incombe. Nous
avons dans un premier temps échangé pour essayer de ramener de la confiance.
Le groupe était traumatisé car il n'avait pas gagné de match en 2017. Nous
avons donc fixé des objectifs à courte échéance, sans trop se
projeter."
Cela s'est traduit comment ? D'abord, gagner le premier match de l'année.
Ce fut difficile, mais on y est parvenu. Ensuite, on a dit aux joueurs qu'ils
avaient tendu la joue à Monaco, au match aller et qu'il était interdit de
tendre l'autre. Nous avons perdu, mais l'équipe s'est parfaitement rebellée
en deuxième mi-temps. Enfin, l'idée était de savoir comment gagner à l'extérieur.
Et là encore, le groupe a apporté une véritable réponse, en réussissant
un match très prometteur à Nancy.
Il y a eu quelques réunions avec les joueurs. D'abord collectivement, puis individuellement. Nous voulions faire entendre aux joueurs que nous pouvions les aider, mais qu'ils restaient les acteurs principaux de tout ça. Et là, la personnalité de Jean-Louis a beaucoup compté. Il a su trouver les mots, mais surtout, son statut d'ancien coach du PSG lui a permis de capter totalement l'attention du groupe. Il a imposé un respect aux joueurs. Cela se voit dans leurs yeux."
Comme le rappelle l'Equipe, le tandem Gasset-Printant a réussi sa mission maintien à Montpellier, malgré un bilan médiocre : 5 victoires, 1 nul, 10 défaites.
Ghislain Printant n'avait pas prévu de devenir coach de L1 (So Foot 22 avril 2016)
Un an après la montée des Bastiais au
Stade de France pour la finale de la Coupe de la Ligue, on a été prendre des
nouvelles de Ghislain Printant. Un homme quelque part entre Montpellier et
Bastia, les vignes et la famille Nicollin, mais surtout un amoureux du
football.
Dans la deuxième partie de l'entretien, l'ancien coach des Corses revient sur
son long exil au Sporting, les problématiques de la formation et des
entourages.
D’où venait cette passion pour les Verts ?
À l’époque, on allait voir Montpellier qui était DH, puis en D3. On les a
suivis, on a grandi avec. Mais pour aller voir des matchs de D1, on allait à
Nîmes – le club phare de la région à l’époque - et aussi à Marseille,
quels que soient les matchs, et a fortiori quand c’était Saint-Étienne.
On était ni nîmois, ni marseillais, on avait un penchant pour les Verts. Je
ne pouvais pas dévier du football, j’étais dedans ! Je n’étais pas un
supporter de Nîmes, mais c’était dur de venir y jouer à l’époque, c’était
chaud à Jean-Bouin, hein. Est-ce que j’ai aimé le fait d’être bercé
dans ces ambiances-là, ces ambiances sudistes, chaudes ? Toujours est-il
qu’à Furiani, je me sentais dans mon élément…
Une bombe agricole, ça n’a jamais fait de mal à
personne…
(Il rit) C’est bien, ça crée de l’ambiance.
Vous, quand vous intégrez La Paillade à 14 ans, vous
faites partie des bons joueurs départementaux ?
À l’époque, on avait une très très bonne génération à l’ASPTT
Montpellier, championne chaque année. Donc beaucoup de joueurs comme moi sont
partis à La Paillade, qui était en train de se structurer. À l’école,
j’étais un élève classique. Je suis allé jusqu’en première, puis je
me suis orienté vers un BEP comptable. Mais bon, entre l’école et le
football, je préférais le foot. J’avais quelques qualités et j’ai pu
intégrer, jeune, pas mal de sélections : celle du Roussillon, de la Méditerranée…
Et c’est là où, je pense, je me suis construit en tant qu’éducateur.
Ces stages se déroulaient souvent pendant la première semaine des vacances.
Pour la seconde semaine, je refaisais faire les tests et exercices faits en
stage aux copains du village qui descendaient sur le terrain. J’avais tout
noté, j’avais cette passion, et je me demande encore comment mes potes, en
vacances, qui venaient pour jouer, ne me disaient pas : «Mais tu
nous fais chier avec tes tests !» Puis, au fur et à mesure, je me
suis dit : «Bon, tu as des qualités, mais tu ne pourras pas être
professionnel.» Dès mes 18 ans, j’ai d’abord passé mon BNS
(Brevet national de secourisme) pour ensuite commencer à passer mes diplômes
d’entraîneur.
Vous n’êtes pas très grand et pourtant vous avez
opté pour le poste de gardien de but…
Parce que mon frère l’était. Et le premier tournoi que j’ai effectué -
en benjamins, je crois - s’était très bien passé dans le but. Et c’est
là que les PTT m’ont recruté, d’ailleurs. J’aimais ça, j’aimais
l’entraînement des gardiens… Du coup, quand je pars jouer en amateur,
d’abord à Vendargues, mon entraîneur, qui connaissait ma passion pour le
poste, m’a dit : «Tu veux pas t’occuper de l’école des
gardiens ? » J’ai dit oui. Et puis mon frère m’a demandé
d’entraîner les gardiens du club de notre village, Fabrègues, qu’il
entraînait. La journée, je travaillais dans une clinique, je faisais les
impressions, j’apportais le courrier, les prélèvements… Je faisais une
heure de plus tous les jours pour avoir mes mercredis après-midi disponibles
pour l’école de football.
Comment vous revenez à Montpellier ?
Jacques Bonnet, le directeur du centre de formation à Montpellier, m’avait
eu comme joueur en jeune et il a vu le travail que j’avais mis en place à
Vendargues. Il est venu me demander : «Tu veux pas venir prendre
notre école de gardien de but ?» qu’il me demande. Je lui ai répondu
: «D’abord, je vais demander à mon club s’ils sont d’accord.»
Mon club, ça les gênait, mais ils ont vu que c’était un gros truc pour
moi, donc tous les mercredis après-midi, j’allais à Montpellier. Je me
suis lié d’amitié avec Jean-Louis Gasset qui, à l’époque, était
l’entraîneur de l’équipe réserve. Et Gasset, qui me voyait travailler,
m’a dit : «Tu peux pas venir pour les gardiens du centre ?»
J’étais passionné, donc sur mes congés, à la reprise du centre, je
l’ai fait. Pendant un mois, ça me permettait de vivre comme si je ne
faisais que du football. Mais je continuais à travailler à la clinique. Et
Aimé Jacquet arrive en 89 à Montpellier. C’est la fameuse année où
Cantona et Paille signent. Aimé Jacquet demande un adjoint et un adjoint qui
pourrait être entraîneur des gardiens de but. Donc je suis convoqué par
Michel Mézy, qui me dit : «Est-ce que demain tu peux être
disponible ?»
On vous propose de vous asseoir sur le banc d’une D1
alors que vous bossez à plein temps dans une clinique…
J’ai réfléchi trois secondes, et j’ai dit : «Oui»
. Je suis reparti et, dans la voiture, je me suis dit : «Là, tu es
dans une drôle de merde, parce que maintenant, il faut aller au boulot pour
l’annoncer.» Dans une entreprise, vous avez un mois de préavis
à donner. Je tournais en rond dans mon bureau, puis je suis allé voir mon
directeur : «J’ai la chance de ma vie, je peux réaliser mon rêve.
Je sais que je vous dois un mois de préavis. Je sais pas comment on peut
s’arranger, mais sachez que demain, je ne serai pas là. Je ne peux pas
laisser passer ça.» Et, agréable surprise, il m’a dit : «Tu
vas à la compta, ils te soldent ton compte.» Le lendemain, j’étais
devenu entraîneur de football à temps plein. J’ai vécu pendant six mois
avec Aimé, comme ça, tous les midis ensemble. C’était un passionné de
football, un exemple. C’était beau, on échangeait. Moi, j’écoutais,
j’apprenais… C’était quelqu’un de merveilleux. Quand on est allé
jouer à Évian-Thonon, j’allais en conférence de presse et quelqu’un
m’a tapé sur l’épaule… c’était lui. Je suis tombé dans ses bras.
Jacquet se fait virer assez vite, mais vous, hormis
une expérience en Lozère pendant deux ans (92-94), vous restez sur le banc
de l’élite comme adjoint en charge des gardiens jusqu’en 2004. Vous avez
même remplacé Mézy comme coach principal avec Baills et Bernardet…
Le président nous a demandé, comme ça, de prendre le relais. Ça s’est
passé rapidement, ça a été difficile. On avait une mission… Avant cela,
j’avais été l’adjoint de Jean-Louis (Gasset), quand Jean-Louis a
été remplacé par Michel,
et le jour où Jean-Louis est parti, il m’avait dit : «Toi, il faut que
tu manges, continue.» Mézy, Nouzaret, Gasset, à Montpelllier, sur le
banc, c’était un éternel recommencement !
Jean-Louis
Gasset, c’est un proche ?
Quand on était adjoints tous les deux de Mézy, on a partagé pendant des années
la même chambre. Jean-Louis, c’est un passionné, un connaisseur, il
respire le football. Et puis il est d’agréable compagnie, c’est un bon
vivant. Passer une soirée avec Jean-Louis, ce sont des bons moments. Ce garçon
a un charisme et un humour extraordinaire, il gagne à être connu. Sur le
terrain, il est capable d’enjoliver un exercice, d’amener une pointe de
fraîcheur sudiste, je dirais. C’est un chambreur. Nous, les sudistes, de façon
générale, on est chambreurs. En Corse, ils appellent ça la «magagne»
.
Vous vous appelez avec Gasset ?
Oui, et même quand j’étais à la tête de Bastia. Sur les conseils qu’il
a pu me donner, sur tous les messages qu’il me transmet, je sens de la sincérité.
Je pense qu’il était heureux pour moi, comme moi je suis fier de l’avoir
accompagné et de voir tout ce qu’il entreprend. Je veux pas être prétentieux,
mais je crois que les gens avec qui j’ai travaillé, que ce soit Mézy, que
ce soit Henryk
Kasperczak, Aimé
Jacquet ou Gasset, ils ont vu qu’il y avait un travailleur à côté
d’eux, un passionné comme eux et surtout, quelqu’un de fidèle, loyal. Il
y a toujours quelque chose à apprendre de ces gens-là. Moi, je suis une éponge.
Avec eux, je parlerais football du lever au coucher. Ces échanges sont
vachement importants, constructifs. Vous vous rendez compte tous les étages
par lesquels je suis passé ? J’avais démarré mes diplômes à 18 ans,
donc je continuais à passer mes diplômes, parce que je voulais me former.
En 2002, quand vous prenez l’équipe première avec
Baills et Bernardet. Qui fait quoi dans ce trio ?
Déjà, on ne s’est jamais posé la question de qui prenait le leadership,
c’était un truc de fou ! Après, il en faut bien un qui se détache… Vis-à-vis
des médias, c’était Gégé (Bernardet) ou Pascal, parce qu’ils
avaient une carrière. Moi, j’avais un rôle que j’aimais : j’étais
dans la construction et l’animation des séances. On avait tous notre mot à
dire.
Vous étiez en charge de la vidéo, aussi.
C’est là où je rigole quand je vois maintenant les analystes vidéo, avec
leur logiciel, les matchs dans le disque, leur montage… Moi, à l’époque,
voilà comment je fonctionnais : j’avais pris le magnétoscope du club à la
maison, j’enregistrais tous les matchs sur Canal, tous les Jour de Foot
aussi, vu que tous les matchs n’étaient pas diffusés, seulement 2 ou 3 le
week-end. Quand tu jouais Paris ou Marseille, souvent diffusés, ça allait,
mais pour les autres équipes… Bref, je reliais mes deux magnétos,
j’avais ma feuille, je notais, je faisais plusieurs montages : animation
offensive, défensive, coups de pied arrêtés offensifs, défensifs. Ça
prenait un temps fou, alors quand il y avait deux ou trois matchs dans la
semaine… Le soir, quand je rentrais, je mangeais, je m’enfermais dans mon
bureau, et ma femme disait au fils : «Bof, n’y va pas.»
En 2004, à Montepellier, vous bifurquez vers la
formation, et prenez en main les équipes de jeunes, les U16, puis la CFA en
2006. Jusqu’à ce qu’on vous montre la porte, quand la réserve descend en
CFA2, en 2010. Soit l’année du titre en L1, quand Courbis d’abord, puis René
Girard ensuite, ont fait monter des jeunes qui doivent vous manquer
cruellement en réserve, justement…
Déjà, malheureusement, de bons gamins ayant le potentiel pour la CFA se
blessent, comme Rémy
Cabella qui s’était fait les croisés et qui a été absent pendant une
longue période. Et puis, même s’il ne faut pas se cacher derrière ça,
c’est vrai que certains gamins avaient été promus chez les pros, comme
Belhanda. Après, c’est le lot d’une réserve, c’est comme ça. On
descend parce qu’il nous a manqué deux victoires… Mais bon, on était
satisfait de voir les gamins tout là-haut.
Vous en avez voulu au club sur le moment, d’en
profiter pour vous sacrifier ?
Non. Le seul regret que j’ai eu, c’est que le club m’a fait une
proposition qui était une espèce de voie de garage : on me donnait un titre
de directeur de centre, mais en réalité, je ne m’occupais plus de
formation, quoi, mais de préformation. Je n’avais pas passé mes diplômes
pour ça, donc j’ai dit aux personnes concernées : «Moi, le
titre de directeur de centre, je n’en veux pas, je veux travailler à la
formation, être sur le terrain.» Qu’on m’enlève la CFA2 et
qu’on me donne les 17 ans, les 19 ans, peu importe, mais je voulais rester
dans la formation. J’ai fait part de ce souhait et quand il y a eu la présentation
de l’organigramme, ils n’en ont pas tenu compte, alors j’ai dit : «Si
je ne suis pas à la formation, je m’en vais.» Montpellier
pourra toujours dire : «On lui a fait une proposition.»
Oui, c’est vrai. Mais bon, je ne l’ai pas acceptée parce qu’elle ne me
convenait pas. Je ne pensais pas quitter mon club, mais c’est la vie. Donc
oui, ça fait mal, c’était dur à encaisser, parce que je pensais quand même
avoir énormément donné au club, avec les pros ou à la formation… Après,
je ne suis pas du tout parti fâché pour autant.
Sérieusement
?
(Il coupe) J’étais déçu par le club, pas par les Nicollin. C’est
à mon travail que je dois non pas ma réussite, mais mon éclosion au plus
haut niveau. Mais je n’oublie pas ce que je dois à la famille Nicollin.
C’est elle qui m’a permis d’être ce que je suis aujourd’hui. Parce
que, à un moment donné, ils ont cautionné que je puisse travailler,
jusqu’à me donner des responsabilités dans une équipe première. Quand on
voit financièrement ce que ça peut coûter, m’accorder une grande marque
de confiance comme ils ont pu le faire aux différents postes que j’ai pu
occuper…. Ça, je ne l’oublierai jamais.
C’est un peu la famille, quoi.
Tout à fait. C’est un club très famille. Alors, après, comme dans toute
famille, y a des disputes ou des séparations, c’est comme ça. Mais moi,
c’est toujours un plaisir lorsque je les rencontre et je sais - je veux pas
employer le terme «ce que je leur dois» parce que je pense que j’ai
travaillé pour le mériter -, mais disons ce qu’ils m’ont permis de
pouvoir faire. Les fils Nicollin, Laurent et Olivier, j’ai des souvenirs
d’eux quand je suis monté avec les pros, et notamment pendant la fameuse épopée
européenne (en 91, le MHSC échoue face à Manchester United en quarts de
la Coupe des vainqueurs de coupes, nldr), puisque j’étais l’adjoint
d’Henryk Kasperczack. Laurent, je crois même qu’à une époque, je devais
entraîner les 17 ans de Montpellier quand lui jouait avec les 19 ans. Je
l’ai vu prendre toujours plus de responsabilités. Même quand j’étais à
Bastia, quand il était dans le dur avec Montpellier, on s’envoyait souvent
des textos.
Vous avez bien connu l’époque du duo Frèche-Nicollin…
Bah, ils ont été énormes, tous les deux. Attention au mot énorme, hein. (il
rit) Une grande complicité… Nicollin, faut savoir quand même d’où
il est parti avec ce club, ce qu’il en a fait. Réussir à rendre ce club
champion de France, c’est quand même extraordinaire. Voir toutes les mains
qu’il a pu tendre dans sa vie, et encore aujourd’hui tous les anciens
joueurs qui sont impliqués au club… C’est bien, ils sont là.
Après tant de temps à Montpellier, par quel
truchement vous arrivez à Bastia ?
À Montpellier, j’ai appris très tard que je n’allais pas poursuivre,
qu’on ne trouverait pas un terrain d’entente. Pour des questions
administratives - et par rapport au chômage, faut pas se cacher -, j’ai
fait en sorte d’envoyer des CV aux clubs, mais je savais très bien qu’au
mois de juin, tous les clubs avaient tous leurs staffs au complet. Or, Bastia
cherchait un directeur de centre. C’est Benoît
Tavenot, qui était à l’époque l’entraîneur de la CFA et qui
ensuite m’a succédé à la direction de la formation, qui leur a dit
qu’il me connaissait.
Propos recueillis par Vincent Riou
2ème partie
Après tant de temps à Montpellier, par quel
truchement vous arrivez à Bastia ?
À Montpellier, j’ai appris très tard que je n’allais pas poursuivre,
qu’on ne trouverait pas un terrain d’entente. Pour des questions
administratives - et par rapport au chômage, faut pas se cacher - j’ai fait
en sorte d’envoyer des CV aux clubs, mais je savais très bien qu’au mois
de juin, tous les clubs avaient tous leurs staffs au complet. Or, Bastia
cherchait un directeur de centre. C’est Benoît Tavenot, qui était à l’époque
l’entraîneur de la CFA et qui ensuite m’a succédé à la direction de la
formation, qui leur a dit qu’il me connaissait.
Pourquoi Bastia se retrouve sans directeur de centre si
tard ?
Parce que le club descendait en National. On s’était même demandé un
moment s’il n’irait pas en CFA. Alors, finalement, Frédéric Hantz est
devenu entraîneur numéro 1, mais au centre, le directeur était parti. Quand
ils m’ont appelé, mon épouse m’a dit : «Écoute, va voir ce que ça
donne.» C’est vrai que nous, du continent, l’éloignement, la Méditerranée,
ça peut être compliqué. Mais je suis venu et est-ce qu’il y avait un
courant qui était passé entre eux et moi ? En tout cas, ils m’ont fait
part de leur intérêt pour que je les rejoigne… En repartant, j’ai dit :
«Bah écoutez, je vais peser le pour et le contre, en discuter avec ma
famille, et lundi, je vous donne une réponse.» C’était le 1er
juillet. Le vendredi 2 au soir, mon père décède. Il était déjà malade,
on s’y attendait, mais bon, je ne pensais pas que ça allait arriver là…
Et je ne me voyais pas quitter ma mère, même mon deuxième frère aîné était
là, mais trois ans auparavant, j’avais déjà perdu le premier... Alors le
lundi matin, j’ai appelé Bastia et je leur ai dit : «Écoutez, je
m’excuse, mais je ne peux pas répondre favorablement à votre offre. Je ne
sais pas exactement ce que je veux faire…» Du coup, ça s’est arrêté
là, on a enterré mon père, on était auprès de ma mère… Quinze jours ou
trois semaines après, je m’en rappellerai toujours, j’étais parti faire
un footing, une fin d’après-midi, les écouteurs dans les oreilles, parce
que, même si je savais que c’était fini, je vivais toujours avec
l’espoir de dire : «Bon, il va sonner ce portable ou il ne va pas sonner
?»
Et c’était Bastia… ?
Oui. «On sentait que le courant passait. Nous, on aimerait que ça soit
vous» , m’ont-ils dit. Alors, je leur ai répondu : «Écoutez, si
ça ne vous dérange pas, je suis en train de courir, je m’excuse, mais,
essayez de me rappeler d’ici trois quarts d’heure, le temps que je rentre
à la maison.» En rentrant à la maison, j’ai dit à mon épouse : «Pour
Bastia, ils viennent d’appeler…» Elle m’a coupé de suite «Tu y
vas ! Tu y vas !» Je pense qu’elle a vu que je commençais déjà à
trouver le temps long. Elle est gérante d’une agence d'événementiel sur
Montpellier qui s’occupe de grosses boîtes, elle a géré les hôtesses de
La Mosson, notamment. Alors je lui ai dit : «Écoute, le football, c’est
aléatoire. Là, je ne sais pas où je vais, c’est un club qui a failli
mourir, tout ça. Tu ne vas pas lâcher ton boulot, je me déplace seul. Tu
restes là.» Mon fils avait 12 ans, il jouait au foot au Montpellier Hérault,
et je ne voulais pas non plus le déstabiliser à l’école. C’était précaire,
en arrivant ici on m’a dit : «Écoutez coach, on vous propose deux ans
de contrat, mais si au bout d’un an, le club n’est pas remonté, on ne
pourra pas assumer. Est-ce que vous êtes d’accord, si on n'y arrive pas,
qu’on s’entende et qu’on arrête au bout d’un an ?» Bon, je
n’avais rien à perdre, j’ai dit : «C’est pas un souci, si ça
capote, ça capote.»
C’est donc Frédéric Hantz qui avait votre destin
entre les mains ?
En quelque sorte. Moi, ça me faisait quand même quelque chose de laisser mon
fils et ma femme, ma mère et mon frère, seul, s’occuper de ma mère. C’était
pas évident, mais je me suis mis à fond dans le boulot, et ça m’a fait du
bien. J’étais au centre dès 7 heures du matin. Et comme personne ne
m’attendait à la maison, je restais, parfois, jusqu’à 22h, je discutais
avec les gamins. Chez moi, on a été élevés dans le travail. Mon père
m’a toujours dit, lorsqu’on regardait tomber les numéros du loto : «Ça,
c’est pas la vérité.» Plus tard, il s’est mis un peu au loto
sportif, comme tout le monde, mais il nous a toujours dit : «Vous gagnerez
de l’argent en travaillant.» Moi, n’ayant pas eu de carrière
professionnelle, il m’a fallu toujours prouver, travailler. Dès la première
année, le club a connu l’accession, et au bout de six mois de la deuxième
année, avant même la fin de saison, les dirigeants m’ont proposé un poste
sur quatre ans, chose qui n’avait jamais été faite ici. J’ai pris ça
comme une grande marque de confiance de leur part.
À Bastia, vous aviez fait le choix d’habiter en
ville ?
Non, en bord de mer. Et mon seul hobby au Sporting, c’était d’être tout
seul, de marcher pendant une grosse heure, avec personne sur la plage, hors
saison. Voilà, de temps en temps, j’appelais mon épouse ou mon fils… Je
ne dis pas que j’arrivais à occulter le football, parce que des choses me
revenaient parfois, mais bon, j’essayais de m’évader un petit peu. Le
football me prenait énormément de temps, je suis tellement passionné que
j’allais voir jouer les 17 ans Nationaux, les 19 ans Nationaux, la CFA, évidemment,
c’est normal.
Votre plan de carrière, c’était quoi quand
l’occasion s’est présentée de prendre les rênes de l’équipe première
?
Je n’ai jamais eu l’ambition d’aller là-haut, en toute honnêteté. Je
me voyais en bon adjoint, puis j’ai pris l’orientation de la formation, et
je suis devenu directeur de centre. Je pensais y faire encore quelques années,
puis, pourquoi pas, être en binôme ou adjoint de quelqu’un sur un niveau
pro ou sur un projet de National… Puis quand j’ai eu cette opportunité,
et que j’ai été prolongé, je me suis dit : «À moi de faire en sorte
d’y rester, d’essayer de tracer ma route là-dedans.» Après, quand
on voit le nombre d’entraîneurs qui se retrouvent sur le carreau et qui ont
une autre carrière que la mienne… Quand j’étais en place, je faisais en
sorte de ne pas me focaliser là-dessus, sur mon avenir. Quand j’ai démarré
cette mission-là, j’ai dit que «la réussite sera de rester soi-même»
. Je pense que la clé est là. Donc j’ai fait en sorte de ne pas changer,
parce qu’en tant qu’adjoint, j’ai vu mes entraîneurs en réussite, et
je les ai vus en difficulté, et je sais très bien que ça peut basculer.
Être le Gasset d’une grosse pointure, ça
pourrait vous plaire ? Vu que c’est ce qui vous plaît le plus d’animer
les séances…
Oui, pourquoi pas… La difficulté de ce genre de binômes, c’est qu’il
faut trouver vraiment la personne, avoir la même sensibilité footballistique
et humaine.
Vous avez estimé qu’il était inexcusable de la
part de Thiriez de ne pas venir vous serrer la main…
Ah oui. Je ne sais même pas s’il avait peur de se faire siffler (il y
avait eu une polémique quand il a refusé de ne pas décréter le 5 mai «journée
sans football» , ndlr) ou peur que quelques joueurs du Sporting ne lui
serrent la main. Déjà, quand on a peur, c’est qu’on a quelque chose à
se reprocher. Jusqu’au bout, ça a été difficile pour moi de dire aux
joueurs : «Bon, maintenant, il faut qu’on monte (à la tribune, pour
le protocole, ndlr) parce que Paris, ils ont gagné, et nous, on ne doit
pas gâcher la fête. Après, on fait ce qu’on veut, mais il faut monter.»
Je ne voulais pas me mettre en porte-à-faux vis-à-vis de mon groupe également.
Il fallait que je tienne compte de ça. J’étais déçu pour mon président
aussi, qui n’a pas pu présenter ses joueurs. Certains, c’est la première
et la dernière fois qu’ils seront au Stade de France en finale. J’ai été
élevé dans le respect, j’y attache beaucoup d’importance, et là, c’était
un grand manque de respect de la part du représentant d’une institution, et
je ne pouvais pas ne pas le dire. On ne peut pas aller que dans les bons
coups. Il fallait qu’il assume, il fallait qu’il vienne, c’était son rôle.
Vos commentaires sur Thiriez à la fin du match ont sûrement
été influencés par la frustration que le match ait été un peu saboté par
l’arbitre, qui non seulement siffle un penalty, mais met un rouge à
Squillaci. Ça a gâché la fête de tout le monde.
Mon père a été arbitre, donc je connais la difficulté des arbitres. Et
souvent, quand j’échange avec les arbitres, je leur dis : «Je connais
l’ampleur, hein.» J’étais sur le banc de touche quand mon père
arbitrait, j’entendais ce que les gens pouvaient dire. Et c’était pas évident,
hein, j’étais jeune. Les erreurs, tout le monde en commet, j’en commets,
les arbitres aussi, mes joueurs. Tout le monde. Mais c’est dommage... Après,
je l’ai dit plus tard, je regrette aussi que le jour de cette finale, on
m’ait posé deux questions, une sur l’arbitre et une sur Thiriez. Moi, je
suis un entraîneur de football, je n’aime que parler football.
Il y a un gamin qui est passé chez vous, à Bastia,
dont la carrière est assez décevante, c’est Thauvin. Quel regard porte le
formateur ?
Flo, on l’a récupéré sur Grenoble et il a de suite intégré le groupe
pro. Il a fallu avoir de la patience pour pouvoir l’amener là parce que,
comme tous ces jeunes qui goûtent très tôt au pro, ils ont de suite envie
d’éclore. Après, il a montré ses qualités, mais je suis très mal placé
pour en parler. Tout le monde est donneur de leçons. Mais, de mon point de
vue, je pense que ça aurait été bien qu’il reste à Lille. Je ne peux pas
parler pour les autres, mais, en tout cas, en tant que formateur, je lui
aurais dit : «Fais tes saisons à Lille, essaye d’y franchir un palier
supplémentaire pour rebondir sur un meilleur club français ou, si tu casses
vraiment la baraque, aller sur l’étranger.» Après, les plans de carrière…
Y a beaucoup de gens qui sont autour de ces garçons-là. Personnellement, je
n’aurais pas fait comme ça. Parce qu’à Marseille, faut quand même être
solide en y allant si tôt. Mais lui, un jeune comme ça, il la voit avec
d’autres yeux, cette transaction, c’est compliqué... Est-ce qu’il a été
mal conseillé ? Certainement. Autour de lui, des gens peut-être auraient dû
lui dire : «Pop, pop, pop, attends. D’abord, on fait peut-être deux ans
là et après on voit.»
Quand on est un formateur, quel regard on a sur la réussite
d’un joueur ?
Quand on est formateur, notre ambition est de les amener là-haut. Et même
quand il réussit, qu’il joue en équipe première, parfois il nous surprend
en bien et d’autres fois, on s’aperçoit que, dans tel domaine, ça reste
quand même insuffisant. Et donc, il faut être capable de dire : «Putain
là, alors avec lui, qu’est-ce que j’ai fait ? Il lui manque peut-être de
l’agressivité, peut-être on ne l’a pas assez mis dans le dur… Chaque
fois, on l’a surclassé, on l’a peut-être installé dans un confort,
c’est pour ça que là, maintenant, il a du mal à réagir.» C’est ce
genre de questions que l’on se pose quand on est formateur et qu’on voit
le garçon réussir. Mais il est bien évident, à Montpellier, la génération
90, qu’on ne pensait pas avoir autant de professionnels, c’était
exceptionnel.
Ça tient à quoi ? Belhanda, c’est vous qui lui
apprenez que Girard va le prendre dans le groupe professionnel. Ça vous est
arrivé de vous dire : «C’est trop tôt !» ?
Ça peut arriver. Après, c’est pas dit qu’on ait raison, hein, et le
gamin, il s’impose. Moi, je sais que j’avais des discussions, souvent,
avec le directeur du centre de formation à Montpellier, Serge Delmas. Je lui
disais : «Younès Belhanda, il est énorme !» et il me disait : «Mais
tu ne le prends jamais !» Pourquoi ? Parce que je ne le sentais pas prêt
pour la CFA, j’avais peur… Il était U19, première année, mais je
sentais qu’il était capable de s’enflammer vite. Alors, souvent, je
prenais Stambouli, Cabella, ou d’autres joueurs avant lui. Avec le recul, je
me dis : «T’as peut-être pas eu tort.» Je me rappelle d’un jour,
je lui ai dit : «Younès, tu vas venir t’entraîner avec nous.» Le
gamin, il me dit : «Je peux vous poser une question ? Pourquoi vous avez
pris pratiquement tout le monde, mais jamais moi ?» Je lui ai répondu ce
que je viens de vous dire. Je lui ai dit : «Tu sais Younès, peut-être
que tu t’es dit "il ne m’aime pas" et d’ailleurs, je
vais te dire une chose, c’est pas parce que tu vas venir jouer avec nous
qu’il faut que tu t’enflammes, que tu te prennes pour un autre. C’est
pas le footballeur qui m’inquiète.»
Quand vous apprenez qu’il part en Ukraine, vous
vous dites que vous aviez raison d’avoir des doutes sur l’homme ?
Disons que je ne suis pas trop loin de ce que je pensais. Après, il est monté
avec les pros, et il a bien géré… Surtout qu’au départ, René (Girard)
l’utilisait milieu excentré à droite. Et lui, il a toujours travaillé
comme milieu axial, là où René l’a utilisé ensuite, numéro 10. Je me
rappelle quand je descendais après le match, il était assis, me regardait et
me disait «Coach, je comprends rien ! Je sais pas quand il faut aller là,
là…» Et moi, je lui disais : «Écoute-moi, du moment que tu joues,
c’est qu’il estime que tu es important pour lui, donc tu fermes ta gueule,
tu ne demandes pas des explications.» Des fois, quand on était en haut
avec le directeur de centre, on rigolait parce qu’il n’avait pas les repères.
Mais il apportait ce que René attendait dans la récupération du ballon, et
après, il avait des qualités pour se projeter… Je lui disais, à Younès :
«Le coach est content de toi. Il te fait jouer goal, tu joues goal ! Peu
importe, le tout, c’est de jouer.» (Il rit.)
Pour un joueur formé qui a sa chance en première, ça
se joue vraiment à rien…
Moi, je leur ai toujours dit : «Vous êtes sur le quai d’une gare, le
train va s’arrêter, va ouvrir les portes, et même si c’est pas le bon
moment, si vous montez dedans (il tape sur la table), il va falloir
confirmer.» Après, on le sait très bien qu’en football, il va falloir
de la réussite… Donc si ce jour-là, l’équipe tourne bien et gagne, on
va vous voir avec des yeux autres que si elle passe à côté et que vous
n’avez pourtant pas été mauvais… Après, il y a des exceptions : je me
rappelle un garçon comme Yanga-Mbiwa. Un jour, Rolland Courbis me dit : «J’ai
besoin d’un défenseur» et il prend Yanga-Mbiwa pour jouer arrière
gauche. Il avait joué à droite, dans l’axe, au milieu. Arrière gauche
!... Évidemment, il a manqué le terrain, il avait été catastrophique,
quoi... Et ça ne l’a pas empêché après d’être le capitaine champion
de France de Montpellier. Dans une génération, on se dit «Allez, si là,
il pouvait y avoir deux ou trois pros, ça serait pas mal.» Mais parfois,
il y en un qui y arrive qu’on n’attendait pas là, parce que le gars avait
un peu de retard, mais il l’a grignoté.
On a quelle satisfaction de voir les gamins éclore au
plus haut niveau ?
Un club comme Bastia, par exemple, s’il arrive, chaque année, à avoir un
joueur qui sort de sa formation et qui puisse taper - déjà, taper, je parle
pas de s’installer - à la porte de l’équipe première, c’est bien.
Quand je vois des garçons comme Kamano ou Djiku… Djiku, je l’ai vu à
Perpignan, on l’a amené ici, il a franchi palier par palier… Pour un
formateur, et même pour un entraîneur, c’est jouissif, mais ces récompenses-là,
j’irais jusqu’à dire que c’est rien comparé aux coups au moral qu’on
prend avec un garçon à qui on a donné énormément, qui avait du potentiel
pour réussir et qui n’y est pas arrivé pour x raisons. Ça peut être une
grave blessure… Mais quand vous avez l’impression de tout donner au mec et
que par un manque de sérieux, à croire que ça va tomber tout cuit malgré
vos mises en garde, celui qui avait certainement plus de qualités qu’un
autre ne perce pas… L’autre qui va réussir, on va être content. Mais ça,
c’est une grosse frustration pour un formateur.
Du coup, vous avez une discussion avec le joueur ?
Oui, et vous êtes obligé de mettre les formes, en lui disant : «Écoute,
t’es pas titulaire chez nous, qu’est-ce que tu te prends un agent ?»
Après, les parents, ils vont dire : «Non, mais vous vous mêlez de quoi,
Monsieur ? Parce que vous lui faites pas confiance ?» Alors donc, le
message, c’est : «À votre âge, où vous êtes, pour l’instant, vous
n’en avez pas besoin. Le jour où vous allez signer pro, prenez un agent. Le
jour où peut-être, vers la fin de votre contrat stagiaire, vous ne signez
pas, là, vous prenez quelqu’un qui puisse vous aiguiller. Nous, déjà, on
va faire en sorte d’essayer de vous aiguiller à droite, à gauche.» Si
tu finis stagiaire, ça veut dire que tu joues en CFA 2 chez nous. Donc nous,
on va téléphoner à des clubs de CFA, à un club de National, selon ses
qualités, pour l’aider. Mais lui, son agent va lui dire - et c’est ce
qu’il se passe hein, c’est la réalité - : «Laisse-moi faire, je vais
te trouver une Ligue 2, je vais te trouver une Ligue 1…» Mais comment ?
Quel club va prendre le gamin ? Il y en a un sur mille ! Un sur mille ! «Mais
va dans un bon club de CFA, avec un bon projet, ou un bon club de National, et
peut-être que tu vas rebondir. La difficulté que tu as connue chez nous va
te permettre, deux ans après, de casser la baraque et là, d’aller signer
un contrat pro dans un club de Ligue 2.» Mais ça, ils ne veulent pas
l’entendre, les parents ne veulent pas l’entendre, l’entourage ne veut
pas l’entendre. «Mais tu ne joues pas ! Tu n’étais pas titulaire en
CFA 2 chez nous, tu veux jouer en Ligue 2 ? Mais quel club va te prendre ?»
On passe pour des fous ! On est des briseurs de carrière. Mais ce n’est pas
le cas, hein. À un moment donné, comme je leur dis : «Vous n’avez pas
réussi, on a notre part de responsabilités, vous avez la vôtre. Voilà,
c’est comme ça.»
On attend avec impatience le jour où votre fils
vous dira : «Papa, je te présente mon agent.»
Non, mon fils, il dit : «Mon agent, c’est mon père !» (Rires)
Il le sait. D’ailleurs, moi, je l’aiguille et je lui dis : «Pour
l’instant, si on s’approche de toi, t’en as pas besoin, tu es à
Montpellier.»
Quand vous êtes allé coacher à Geoffrey-Guichard, là
où vous alliez parfois en famille, ça vous a fait quoi ?
J’ai beaucoup pensé à mes parents. Deux jours avant, je leur ai adressé
un message, en disant : «Vous serez peut-être fier de moi. Et quand je lèverai
les yeux, je vous verrai.» Ce sont eux qui m’ont donné l’envie, la
passion du football et ils ont réussi à nous faire vivre, nous les enfants,
des matchs fabuleux, PSV Eindhoven, Bayern de Munich, Dynamo de Kiev, Split…
Mon père n’avait pas d’autres vices que le foot. Il ne fumait pas, ne
buvait pas. Aujourd’hui, moi, ce dont je suis fier, c’est que j’ai réussi
à faire de ma passion mon métier. C’est quelque chose de fort.
Est-ce que vous vous intéressez à l’actualité générale
? Vous lisez des journaux autres que sportifs ?
Des fois, je sais pas si je vais vous faire rire, mais je dis à ma femme : «Dis-moi,
est-ce qu’on a toujours le même président de la République ?»
Monomaniaque à ce point-là ?
Ouais, je regarde quand même beaucoup le foot, émissions, matchs, et y en a
beaucoup, hein. Bon, j’essaye, quand même de regarder les gros titres.
Comme tout le monde, j’ai été un peu déçu par le monde politique. Je
suis un mauvais Français, à Bastia, j’avais fait une procuration à ma mère,
mais depuis qu’elle est partie… C’est pas bien, c’est un devoir, il
faut voter. Un jour, je regarde un Monaco-Nice, et il y a une minute de
silence. Je me dis : «Mais c’est quoi, ça ?» Donc j’ai repris le
Corse-Matin : «Ah merde, y a eu des intempéries, des morts. Mais
tu es vraiment un abruti !»
Propos recueillis par Vincent Riou