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Championnat ( 37ème
journée) |
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Vendredi 11 mai 2018 |
Info du 30 avril :
Dans un communiqué
laconique publié ce soir sur son site officiel, l'ASSE se contente de "regretter"
l'arrêté
ministériel interdisant la présence des supporters stéphanois sur le Rocher
lors du match Monaco-Sainté programmé le samedi 12 mai. Le club ne
semble manifestement pas disposé à faire appel de cette scandaleuse
interdiction. La peur de troubler le sommeil du Prince, sans doute. Qu'importe
! On compte sur le peuple vert pour se déplacer en masse et réveiller le
Stade Louis-II.
Info du 2 mai :
Alors que Frédéric Paquet est resté d'une discrétion de violette sur le
sujet hier
soir, l'ensemble des groupes de supporters stéphanois, des Ultras aux
Associés, appellent à braver la nouvelle interdiction de déplacement
abusive à Monaco, prononcée à l'encontre du Peuple Vert.
Comme l'a si bien dit hier sur BFMTV Michel
Delpuech, Préfet de Paris, "Il faut bien comprendre qu'on est
dans le cadre d'un Etat de droit. La liberté de manifester existe, la liberté
d’aller et venir aussi."
Info du 3 mai :
Tous les groupes de supporters stéphanois ayant invité hier le peuple
Vert à braver le scandaleux
arrêté du sinistre d'Etat de Monaco, le club de la Principauté a répliqué
aujourd'hui sur
son site officiel : "Sur instruction des autorités monégasques,
la vente des places pour le match AS Monaco - AS St-Etienne est limitée aux
guichets du Stade Louis-II à partir du lundi 7 mai."
De leur côté, les ultras monégasques ont affiché sur
leur compte facebook leur soutien aux supporters des Verts. "Nous
regrettons l’arrêté à l’encontre des supporters de Saint-Étienne leur
interdisant de venir au stade Louis II pour le match Monaco - Saint Étienne.
Cela n’est pas le sport comme nous le concevons, et cette décision va
encore à l’encontre du football populaire. La rencontre a lieu dans 9
jours, nous espérons un changement favorable afin que les supporters stéphanois
puissent venir encourager leur équipe !"
Info du 7 mai :
Interpellé par ses supporters, l'ASSE a finalement décidé de contester
l'arrêté interdisant aux fans des Verts de se rendre à Monaco samedi
prochain. France
Bleu nous apprend en effet que deux manoeuvres ont été entreprises
par le club.
1. Convaincre l'AS Monaco d'interférer en faveur de l'ASSE.
Le club a accepté et les ultras monégasques ont aussi pris position en
faveur d'une autorisation de déplacement des supporters stéphanois. La
proposition est la suivante : 500 supporters dans 10 cars, au départ de
Saint-Étienne. La réponse des autorités monégasques devrait tomber
sous peu, une réunion avait lieu ce lundi, mais le club n'est forcément pas
confiant.
2. Le recours juridique devant un tribunal monégasque. Il
parait peine perdue : 3 clubs ont déjà tenté leur chance dans le passé
(Bastia, Anderlecht et le Besiktas) et s'y sont cassé les dents. Aucun juge
monégasque n'est jamais allé à l'encontre de son gouvernement. Aujourd'hui,
l'ASSE n'a aucun moyen d'empêcher les supporters d'aller à Monaco malgré
les interdictions. Elle dit respecter ce choix mais les a tout de même prévenu
des menaces brandies par le gouvernement monégasque : interpellations,
gardes à vue et peines de prison.
Représentant du gouvernement monégasque,
Patrice Cellario estime que l'arrêté d'interdiction est justifié : "Les
autorités monégasques peuvent comprendre non seulement l’étonnement, mais
également la déception que la décision prise peut susciter chez les
supporters stéphanois. Selon le calendrier des événements, les moyens
propres des services de l’Etat de Monaco peuvent être considérés comme
non parfaitement adaptés pour garantir cet objectif de sécurité et des
renforts doivent être demandés aux Autorités françaises pour garantir le
bon déroulement des manifestations.
C’est le cas du week-end du 12 et 13 mai prochains, durant lequel les
personnels des services de la Principauté seront très fortement mobilisés
et sur des amplitudes horaires très conséquentes. En l’absence de
possibilité de renfort d’unité de force mobile française, les Autorités
monégasques ont considéré que les conditions de sécurité n’étaient pas
réunies pour assurer un bon accueil des supporters stéphanois et de leur KOP,
dont la ferveur et l’engagement sont réputés et bien connus.
Sans prendre à la légère les conséquences d’une telle mesure
d’interdiction de déplacement des supporters, les Autorités monégasques
ont considéré qu’elle s’imposait. Elles sont d’ailleurs rejointes dans
cette analyse par les Autorités françaises qui, tant sur les Alpes-Maritimes
qu’au niveau national, ont pris des mesures similaires."
Infos du 9 mai :
Selon la dernière édition du Progrès,
les
manoeuvres évoquées avant-hier par France Bleu n'ont pas abouti
: les autorités monasques et le préfet des Alpes-Maritimes maintiennent
l'interdiction de déplacement des supporters stéphanois.
"Frédéric Paquet avait rencontré les groupes stéphanois vendredi à
ce sujet. Mais, pour l’heure, rien n’y fait. Les autorités restent fermes
et fermées. Pas question de montrer un maillot vert ou de pousser une
chansonnette de la même couleur, samedi, entre Nice et Menton."
Gageons que de nombreux supporters stéphanois feront quand même le déplacement
en voiture pour déferler sur le Rocher samedi soir !
Dans un communiqué commun posté sur notre forum par le potonaute DedFuriana, quatre des cinq groupes de supporters stéphanois affichent leur détermination à se rendre "par tous les moyens" à Monaco ce samedi soir malgré les arrêtés pondus par des autorités monégasques et des Alpes-Maritimes restées de marbre malgré la riposte de l'ASSE.
Info du 11 mai :
Les groupes de supporters stéphanois ayant affiché leur détermination
à braver l'interdiction de déplacement en se présentant demain à
billetterie du Stade Louis II, l'AS Monaco a indiqué aujourd'hui sur
son site officiel que la vente des billets fermera dès ce vendredi à
20h00 et qu'"aucun billet ne sera vendu le jour du match".
Le club de la Principauté précise qu'il agit "sur instruction des
autorités monégasques." Reste à savoir si l'ASSE va regretter
cette mesure et si les groupes vont quand même tenter de déferler sur le
Rocher...
Info du 12 mai :
Selon la dernière édition de l'Equipe, "200 ultras stéphanois sont
décidés à braver l'interdiction de déplacement à Monaco en passant par
l'Italie à bord de voitures particulières. Après avoir rappelé tous leurs
policiers et fermé toutes les frontières, les autorités monégasques ont
demandé au parquet de la Principauté de préparer des salles pour les gardes
à vue, au cas où ils parviendraient jusqu'au stade Louis-II."
Sur
son compte twitter, l'avocat Pierre Bathélémy s'est indigné à juste
titre du traitement réservé aux supporters stéphanois qui ont tenté en
vain d'aller soutenir leur équipe sur le Rocher.
"Ce qui est en train de se passer à Monaco et autour est fantastiquement
pathétique. Aucun supporter stéphanois ne méconnaît l'arrêté
(interdiction de se comporter en supoorter) et ne crée le moindre trouble.
Mais les effectifs de police prétendument indisponibles les bloquent.
1.Ils ont menti dans l'arrêté sur les forces disponibles. Moi qui croyais
qu'ils étaient retenus par la lutte contre le terrorisme...
2. Ils empêchent illégalement à des citoyens français respectant l'arrêté
de circuler en France.
Immense respect aux supporters qui gardent leur calme et leur sang-froid face à des abus gravissimes. Eux qu'on taxe de violence de manière abusive et qui restent ultra respectueux face à des comportements publics graves. Au lieu d'encadrer 10 bus de supporters, on a mis des policiers dans les gares et sur les routes pour contrôler tout le monde. On a mobilisé le directeur de cabinet du Préfet pour faire le guet à la gare de Menton. C'est ça un arrêté qui permet d'économiser les forces de l'ordre ? Les supporters sont renvoyés par le train en Italie !!!!! La France expulse ses propres citoyens parce qu'ils aiment leur club de football."
L'ASSE, qui s'était contentée de regretter le scandaleux arrêté d'interdiction pris par les autorités monégasques, a publié ce soir un nouveau communiqué.
"L’AS Saint-Etienne salue le
comportement exemplaire de ses supporters venus à Monaco apporter un soutien
remarqué et apprécié à leur équipe malgré l’interdiction de déplacement
décidée à leur encontre. Pénalisés par une décision injuste qui les a
empêchés d’assister au match, les supporters présents ont exprimé sans
violence leur mécontentement. Cette attitude honore le Peuple Vert. Elle
montre également que la décision du Gouvernement monégasque d’interdire
le déplacement des supporters stéphanois n’était pas justifiée.
Désireuse de promouvoir un football populaire, l’ASSE rappelle
d’ailleurs que la ferveur de ses supporters contribue largement au caractère
festif des matches qu’elle dispute. Tout en regrettant que son équipe ait
été injustement privée du soutien de son public durant un match décisif
face au champion de France 2017, le club souhaite désormais une mobilisation
totale de ses forces vives, dans le respect des valeurs qu’il défend,
samedi prochain au stade Geoffroy-Guichard, face au LOSC.
L’ASSE prône un dialogue constructif avec tous les supporters afin que
ceux-ci puissent vivre leur passion sans restriction ni excès."
Communiqué officiel
L’AS Saint-Etienne salue le comportement exemplaire de ses supporters, notamment de ses ultras, venus à Monaco apporter un soutien remarqué et apprécié à leur équipe malgré l’interdiction de déplacement décidée à leur encontre. Pénalisés par une décision injuste qui les a empêchés d’assister au match, les supporters présents ont exprimé sans violence leur mécontentement.
Cette attitude honore le Peuple Vert. Elle montre également que la décision du Gouvernement monégasque d’interdire le déplacement des supporters stéphanois n’était pas justifiée.
Désireuse de promouvoir un football populaire, l’ASSE rappelle d’ailleurs que la ferveur de ses supporters contribue largement au caractère festif des matches qu’elle dispute. Tout en regrettant que son équipe ait été injustement privée du soutien de son public durant un match décisif face au champion de France 2017, le club souhaite désormais une mobilisation totale de ses forces vives, dans le respect des valeurs qu’il défend, samedi prochain au stade Geoffroy-Guichard, face au LOSC.
L’ASSE prône un dialogue constructif avec tous les supporters afin que ceux-ci puissent vivre leur passion sans restriction ni excès.
Info du 13 mai :
Dans l'Equipe et Le
Progrès du jour, le DG de l'ASSE Frédéric Paquet
regrette que 200 supporters stéphanois aient été stoppés à Menton avant
le match d'hier soir : "Le comportement de nos supporters s'est voulu
intelligent et exemplaire. Il y a eu des discussions. Ils ont essayé de faire
entendre leur point de vue. Il n’y a pas eu de violence, ils n’ont pas eu
la volonté de forcer quoi que ce soit. Ils ont été raisonnables et
intelligents dans leur déplacement puisqu’il n’y a pas eu d’incidents.
Les leaders des groupes s’y étaient engagés. Grâce aux relations que
l’on entretient avec eux, tout se passe en bonne intelligence. C’est sain
et cohérent. Il ne s’est jamais rien passé à Monaco. Il n’y a pas
d’antécédent avec nos supporters. Malgré l’interdiction, ils ont tenu
samedi à supporter leur équipe. Ce qui prouve leur engagement, dans un
moment, en plus, où il y a un enjeu particulier. Je suis sensible à leur démarche
de montrer leur attachement au club. Cela prouve que les supporters peuvent se
déplacer sans violence ni incidents, et que l'on peut être supporter et ne
pas se comporter en voyou. Il faut rester juste dans les décisions qu'on a à
prendre. Et cette décision d'interdire à nos supporters de se rendre à
Monaco supporter leur équipe est regrettable et injuste. Il y a eu aussi des
familles qui étaient là, qui sont venues pour le plaisir et qui n’ont pas
pu trouver de billets. C’est regrettable car il faut permettre à tous les
gens qui se comportent bien de pouvoir entrer dans le stade."
En conférence de presse, Jean-Louis Gasset a eu également quelques mots pour ces supporters. "Il faut qu'ils sachent que l'on est fiers d'eux. Sans embrouille, ils sont rentrés chez eux. Il faut souligner leur comportement exemplaire, et personnellement je les félicite."
Nice-Matin revient sur la reconduite à la frontière des 200 supporters stéphanois qui ont tenté en vain d'assister hier au match de leur équipe à Monaco : "Vers 18h20, ils ont été interceptés en gare de Menton Garavan par les forces de l'ordre alors qu'ils venaient de Vintimille, leur lieu de rendez-vous. Dans le calme, ils ont été regroupés sur le quai opposé avant d'être renvoyés en Italie peu avant 19h00. Le directeur du cabinet du préfet des Alpes-Maritimes, Jean-Gabriel Delacroy, était sur place. "Ce sont des mesures exceptionnelles que nous ne renouvellerons, bien sûr, pas à tous les matches. Le précédent en la matière était pour les supporters de Besiktas. Monaco est un gouvernement souverain mais côté français, nous ne pouvions pas rester passifs car Monaco est environné par la France." Aucun débordement n'a été constaté durant ce regroupement."
Mediapart a souligne que les IAS (interdictions administratives de stade) frappant les ultras (notamment stéphanois) sont souvent abusives. Extraits.
"Malheureusement, c'est plus facile d'aller en Syrie que de chanter pour vous à Monaco", clamait en 2015 une banderole des Green Angels, un des groupes de supporteurs de Saint-Étienne, après une interdiction de déplacement en Principauté. Instaurée par la loi LOPPSI 2 en 2011, cette mesure prise par arrêté préfectoral interdit l'accès au stade aux supporteurs d'une équipe définie. Depuis, les mesures se multiplient. Barbe fournie, casquette et bermuda, Tom est l’un des responsables des Green Angels. Il raconte : "Récemment, on a été interdits à Strasbourg, Nantes, Lyon, Nice et Marseille. C’est décourageant." À ses côtés, un ami poursuit : "On est des sous citoyens. Vendredi, on se déplace à Montpellier. On est limités à 350, obligés d’y aller en bus et on va attendre des heures sur une aire d’autoroute que les flics nous escortent jusqu’au stade."
Depuis quelques années, l’interdiction administrative de stade (IAS) est venue s’ajouter à la panoplie des contraintes pesant sur les amateurs de football, qui ambiancent les tribunes populaires, virages et kops, défendant une certaine ferveur face au foot-business et ses places à des prix inaccessibles dans des gradins parfois moroses. Introduite par la loi antiterroriste de 2006, cette IAS permet au préfet d’interdire de tribune un individu qui n’a pas nécessairement commis d’infraction, mais dont le comportement laisse penser qu’il représente un risque de trouble à l'ordre public. Cette mesure est venue compléter l’arsenal répressif anti-ultra qui était jusque-là structuré autour de l'interdiction judiciaire de stade, inscrite au Code pénal en 1993 comme une peine complémentaire à une condamnation après une infraction commise dans une enceinte sportive.
"En juillet 2017, j’ai reçu une IAS de 6 mois", témoigne Tom le Stéphanois. 3 mois plus tôt, il faisait partie des 250 supporteurs foréziens ayant violé un huis clos prononcé par la LFP, en occupant les gradins du stade Geoffroy-Guichard lors d’un match face à Rennes. D’habitude, les interdictions administratives de stade sont le plus souvent prononcées pour "usage ou détention d’engins pyrotechniques ou de violences", explique Antoine Mordacq, chef de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme. À l’origine, l’IAS ne pouvait excéder 3 mois, mais avec la loi LOPPSI-2 puis la loi Larrivé de 2016, sa durée maximale est désormais de 24 mois, et 36 en cas de récidive. Début avril, 296 interdictions de stade étaient en vigueur en France, dont 166 administratives et 130 judiciaires. Antoine Mordacq tient à nuancer : "Ces chiffres évoluent. Tous les interdits de stade ne le sont pas 24 mois, mais généralement 3 ou 6."
Comme l’énonce le Code du sport, l’IAS sanctionne un comportement d’ensemble ou la commission d’un acte grave. Avant d’être actée, elle doit être soutenue par plusieurs éléments. "C’est souvent un rapport de police, le témoignage d’un stadier, une plainte du club ou la vidéosurveillance », explique l’avocat Pierre Barthélemy. Dans le dossier de Tom, la vidéosurveillance du musée de l’AS Saint-Étienne – par lequel les supporteurs ont pénétré dans l’enceinte pour rejoindre les tribunes et violer le huis clos – a été convoquée. Mais il assure : « Ce n’est pas moi sur la vidéo, mais un ancien président des Green Angels." Un autre avocat défenseur de plusieurs ultras, Thibault Pozzo di Borgo, affirme que les éléments soutenant l’IAS "sont très souvent inexploitables".
James, porte-parole de l’Association nationale des supporters (ANS), estime que les ultras sont des victimes collatérales d’un dispositif les englobant malgré eux. Il dénonce les dérives d’une mesure de prévention détournée en mesure de sanction, non pas fondée sur une infraction, mais sur l’identification d’un supporteur " potentiellement" dangereux. "C’est Minority Report : qu’est-ce qu’il a fait ? Rien, mais il pourrait faire quelque chose." L’interdiction de stade s’accompagne d’un pointage au commissariat. Pour Tom, c’était lors de chaque match de Saint-Étienne. "Cela peut aller jusqu’à 54 pointages en dix mois", compte-t-il.
Pour Me Pozzo di Borgo, l’IAS « est une atteinte à la liberté d’aller et venir. Mais elle n’est pas considérée comme telle par le Conseil d’État qui estime qu’elle n’est pas une atteinte excessive au regard de l'intérêt protégé ». Initialement, l’interdiction de stade était prononcée en attendant la tenue d’un procès judiciaire. Pour l’avocat Pierre Barthélemy, elle est de plus en plus "dévoyée de cet objet". "Dans certains cas, cette mesure administrative intervient après que le juge judiciaire a relaxé le supporteur ou que le Parquet a classé sans suite."
Avant d’être interdit de stade, un supporteur reçoit une note d’intention de la préfecture. Il a ensuite 6 à 10 jours pour présenter ses observations orales ou écrites à cette dernière. "C’est la procédure contradictoire. Elle permet à l'intéressé de se défendre lors d’une audition", expose le policier Antoine Mordacq. Maître Pozzo di Borgo ne partage pas cet avis : "Les personnes ne sont jamais réellement écoutées. Quand le préfet a décidé de prendre la mesure, il le fait." S’il juge son interdiction illégale, le supporteur peut ensuite saisir le juge administratif pour un recours, non suspensif, une procédure qui prend entre un et deux ans. Un rapport sénatorial de 2016 révélait que deux tiers des interdictions administratives de stade contestées étaient annulées, ce que confirment les avocats spécialistes interrogés. Avec un effet pervers contesté : ces annulations ont lieu alors que le supporteur a déjà effectué son IAS.
Pour suspendre immédiatement son interdiction, le supporteur a une autre option : le référé suspension. Pour qu’il soit accepté, il faut qu’il y ait urgence à statuer et des moyens sérieux de contestation. « Or, dans la majorité des cas, le juge estime qu’il n’y a pas d’urgence concernant une personne privée de stade et obligée de se rendre au commissariat à chaque rencontre », regrette Pierre Barthélemy. Récemment, des supporteurs de Saint-Étienne se sont plaints d’une autre restriction de leurs libertés. Après une demande de passeport, un membre des Green Angels s’est vu refuser sa délivrance en septembre 2015. Dans le cadre d’une IAS, rien n’autorise pourtant la préfecture à ne pas remettre son passeport à un individu. "C’est totalement illégal", commente Pierre Barthélemy.
Après la violation du huis clos stéphanois, Tom s’est senti victime d’une sanction injustifiée : "Nous n’avons violé aucune loi de la République, mais une décision de la commission de discipline de la Ligue de football professionnel. Elle s’est saisie de l’affaire et n’a poursuivi personne, son règlement ne prévoyant rien en cas de violation d’un huis clos." Trois mois plus tard, une vingtaine de responsables des groupes ultras Magic Fans et Green Angels sont frappés d’interdictions administratives de stade. Aujourd’hui, cet événement cristallise encore les tensions. "Pourquoi punir les leaders, qui dialoguent avec les différents services du club ?, s’interroge Tom. Même un ancien leader qui n’était pas au stade ce jour-là a été visé."
Mahamadou Diarra, qui occupait le poste de directeur de cabinet du préfet de la Loire au moment des faits, est de son côté formel : "Il n’y a pas eu de ciblage. Ils ont été identifiés par les policiers et les référents hooliganisme sur les lieux." Pourtant, dans le dossier d’un Green Angel, un des éléments produits par le préfet devant le tribunal administratif après la violation du huis clos est le procès-verbal d’une assemblée générale du groupe ultra, contenant le nom des membres du conseil d'administration – donc des leaders. Trois des cinq personnes inscrites sur ce document ont écopé d’une IAS. Interrogé, M. Diarra élude : "Je ne peux pas revenir sur les cas individuels."