Un ancien entraîneur des U 19 Abdelaziz BOUHAZAMA (2007-2013) | |
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Ce
coach, éminemment sympathique, arrive à l'ASSE durant l'été 2007 pour prendre en mains l'équipe des
moins de 18 ans, succédant ainsi à JP Primard appelé auprès de
l'équipe CFA. Ce natif de l'Isère ( le 4 janvier 1969 à St Martin d'Hères) a joué à Village Olympique Grenoble de 1977 à 1982, à Norcap Grenoble de 1982 à 1984, au FC Grenoble de 1984 à 1994, à Tours (1996-1997), Chatellerault (1997-2002) et a terminé sa carrière à Tours lors de la saison 2002-2003. L'année suivante (2003-2004), il devient l'entraîneur adjoint de Tours. La saison 2004-2005, il prend en charge l'équipe B. Durant la saison 2009-2010, il coache les U19 (qui ont succédé aux moins de 18 ans), et en mai 2010, son contrat est renouvelé pour 2 ans. (voir ici). En 2011 et 2012, il conduit les U19 en Finale de la Coupe Gambardella : malheureusement ces 2 finales se terminent par 2 défaites : en 2011, face à l'AS Monaco (aux tab) et en 2012 face à l'OGC Nice. A la fin de la saison 2012-2013, Abdel quitte l'ASSE pour le SCO Angers où il va devenir le Directeur du Centre de Formation. Merci Abdel pour tout ce que tu as donné à nos jeunes et à l'ASSE. |
Abdel a pleuré en quittant Saint-Etienne (Source : Poteaux Carrés, 26 novembre 2016)
L'ancien entraîneur des U19 stéphanois et actuel directeur du centre de formation du SCO Abdel Bouhazama s'est confié à Ouest-France avant le match Angers-ASSE du 26 novembre 2016. Extraits.
"Le jour où Saint-Etienne a décidé de me faire confiance, j'ai ressenti beaucoup de fierté. L'ASSE, c'est plus qu'un club, c'est une institution. Il y avait donc aussi un peu de pression. J'ai découvert un vrai grand club : par ses moyens financiers, son histoire, son stade, son public, son centre de l'Etrat qui est magnifique... Il y a un mot qui me revient, c'est la passion. Sainté est un club qui ne laisse pas indifférent. Quand on voit le nombre de sections de supporters, ça montre l'engouement qui existe autour de l'ASSE. Et de l'intérieur, je retiens le travail effectué. Mais le mot qui ressort, c'est vraiment passion car tout le monde convergeait pour que l'ASSE soit sur le devant de la scène.
Cela a été dur de tourner la page car j'ai quand même passé six ans à Saint-Etienne. Quand j'ai été sollicité par le président Saïd Chabane, il a utilisé des mots forts par rapport au projet angevin. Il m'a fait douter. A Saint-Etienne, j'étais peut-être aussi à un tournant de ma vie d'entraîneur et de formateur. Ce club m'a offert beaucoup de belles choses notamment avec les deux finales en Coupe Gambardella mais Monsieur Chabane me proposait le poste de directeur du centre de formation. J'ai réfléchi par rapport à ce projet du SCO. Aujourd'hui, c'est la même passion et la même exigence mais c'est en meme temps totalement différent pour moi.
Ici, on est en train de faire grandir, tous ensemble, le club d'Angers. A Saint-Etienne, je m'imbriquais quelque part dans une institution existante. Ce sont deux clubs totalement différents mais qui convergent vers l'exigence et le professionnalisme. Et ça, c'est important à mes yeux. Aujourd'hui, je suis vraiment épanoui à Angers mais c'est vrai que le jour où je suis parti de Saint-Etienne, j'ai pleuré car c'est une ville où il y a de vraies valeurs, où j'ai noué de belles amitiés. A Angers, je retrouve un peu des similitudes sur le plan humain.
L'ASSE et l'OL sont deux grands clubs, formateurs tous les deux. Quand j'étais à Saint-Etienne, à un moment donné, on avait l'impression que les Lyonnais nous prenaient un peu de haut. Les Lyonnais se font un malin plaisir à dire que Saint-Etienne est la banlieue de Lyon. Sur le terrain, c'est un vrai derby même chez les jeunes. Le premier que j'ai connu, Roland Romeyer m'a dit : "Abdel, on gagne ce week-end, on gagne !" Les supporters venaient sur les matches de jeunes quand il y avait un derby. C'étaient des matches qu'il ne fallait pas perdre."
Le nouveau rôle d'Abdel Bouhazama à Angers (Source : Poteaux Carrés, 10 février 2017)
Abdel Bouhazama ex-entraîneur des U19 double finaliste de la Coupe Gambardella en 2011 et 2012, est revenu pour nous sur le derby et nous a parlé de ses nouvelles fonctions au SCO.
"J'ai vécu le derby comme tous les supporters stéphanois je crois, même si j'étais devant ma télé. Je suis très très content car les joueurs ont joué un vrai match de coupe en s'appuyant sur toutes les vertus stéphanoises. Il faut aussi rendre hommage à Christophe Galtier qui a choisi d'exerccer un pressing haut sur le terrain ce qui a énormément gêné les Lyonnais. Avec Geoffroy Guichard en ébullition, c'était une soirée magnifique.
A Angers ma fonction principale reste la direction du centre de formation. Il y a eu une réorganisation technique et il a été décidé de faire monter Patrice Sauvaget comme deuxième adjoint de Stéphane Moulin. Début janvier, le club m'a donc sollicité pour prendre la CFA2. J'ai rapidement donné mon accord pour le bien du club et aussi parce que c'est une belle expérience sur le plan personnel.
J'ai eu des échanges avec Stéphane Moulin pour savoir ce qu'il attendait de moi car il ne faut pas oublier qu'on travaille avant tout pour l'équipe première. Il est important que les pros restent disponibles sur les plans psychologique et athlétique, il faut savoir les écouter lorsqu'ils sont déçus de descendre en réserve. Et parallèlement, il faut mettre les jeunes dans les meilleures conditions pour qu'ils s'aguerrissent. C'est une remise en question car on pense parfois maîtriser les choses sur certaines catégories, là on casse la routine.
J'ai beaucoup de travail mais quand on est passionné c'est du plaisir. Et puis mon équilibre familial, le plus important pour moi, m'aide beaucoup. En plus on est sur une bonne dynamique de résultats puisque nous sommes deuxièmes.
J'ai encore régulièrement des contacts avec des personnes que j'ai connues à Sainté, des jeunes que j'ai coachés ou des gens encore en place. Je suis même allé passer un week-end chez Josuha Guilavogui récemment. Je suis bien à Angers, je travaille dans d'excellentes conditions mais je n'oublie pas les Verts."
L'hommage de Nicolas Pepe (LOSC) à Abdel Bouhazama (Source : Poteaux Carrés, 5 février 2019)
Le meilleur joueur du LOSC rend hommage à l'ancien entraîneur des U19 stéphanois dans la dernière édition de France Football.
"Si le directeur du centre de formation du SCO Abdel Bouhazama n’avait pas été sur ma route, peut-être que je ne serais pas là aujourd’hui. La première fois que je l’ai croisé, j’étais avec mes parents et j’avais une grande crête sur la tête. Il m’avait serré la main pendant trente secondes, il ne me la lâchait pas et me regardait fixement : “Tu vas penser à couper tes cheveux’’, m’a-t-il dit. Je croyais qu’il rigolait mais il était très sérieux. Deux semaines ont passé puis il est venu : “Si tu ne les coupes pas, tu n’iras plus t’entraîner.’’ Je n’allais quand même pas me priver de ma passion pour une coupe de cheveux, alors je me suis dit que j’allais respecter les règles de vie. Souvent, il nous réveillait à 6 heures pour courir. Il nous a arrêtés devant des éboueurs: “Regardez-les!’ ’Il voulait nous faire prendre conscience que plein de gens n’ont pas notre chance. Il ne faut pas la gâcher. Un jour, il y a eu un incident, un vol dans un supermarché. On s’est fait attraper. Parfois, dans la vie, on n’a qu’une chance. Abdel Bouhazama, le président et Olivier Pickeu nous en ont donné une seconde. On jouait le maintien avec la réserve et la plupart des joueurs importants étaient ceux qui s’étaient fait prendre, alors on l’a saisie et on a évité la relégation en Division d’Honneur. À cette époque-là, j’étais faible mentalement. Mais c’est là-bas que j’ai commencé à être fort. Ces leçons m’ont servi et me servent encore. Elles ont agi comme des déclics chez moi."
Directeur
du centre de formation du SCO d'Angers et ancien entraîneur des U19 stéphanois,
Abdel Bouhazama s'est confié, le 22 avril 2019, avant la finale de Coupe
Gambardella qui opposera les Verts de son ancien adjoint Razik Nedder au TFC
samedi après-midi au stade de France (match à suivre à 17h15 sur France 4
et Eurosport 2).
Abdel,
ça te fait quoi de voir les Verts retourner au Stade de France pour la finale
de la Gambardella ?
Ça fait plaisir, bien sûr, d'autant plus qu'il y a Razik ! Je suis content que
Saint-Etienne retourne au Stade de France. Cela montre la qualité de la
formation stéphanoise. J'ai vu que l'entraîneur des pros avait félicité le
centre de formation et Razik. Pour la demi-finale contre Bordeaux notamment
Jean-Louis Gasset avait mis à disposition de la Gambardella William Saliba,
c'est tout à son honneur. C'est bien que les Verts soient en finale pour le
club, pour les éducateurs du centre de formation. Bien sûr Razik est un grand
artisan de la qualification et de ce joli parcours, mais il faut associer les
autres éducateurs, Laurent Batlles notamment car les meilleurs U19 qui jouent
habituellement en N2 descendent en Gambard'. Il faut également souligner la
qualité du travail de la cellule de recrutement dirigée par Gérard Fernandez.
C'est grâce à elle que le club a pu recruter de très bons joueurs, comme
William Saliba.
Tu as collaboré étroitement avec Razik Nedder
pendant deux ans. Quels souvenirs gardes-tu de lui et comment juges-tu son évolution
?
On a travaillé deux ans ensemble avec les U19. A l'époque où il m'a rejoint,
je crois qu'il travaillait avec les U13. Avec son emploi du temps et son activité
principale qui était en dehors du foot, il avait un peu de temps de libre qu'il
mettait à profit pour voir les séances d'entraînement. On avait sympathisé
et je lui avais proposé de venir m'épauler. Avec l'autorisation du club ça
nous a été accordé. Il était souvent avec moi sur les séances. On
discutait, on échangeait. Je lui avais donné quelques séances à faire car
c'est le meilleur des apprentissages. Quand tu mets les mains dans le cambouis,
c'est le meilleur moyen de tester ta pédagogie et ta psychopédagogie. Je me
souviens que Razik me posait beaucoup de questions. Il était toujours en
questionnement, me demandait en permanence le pourquoi du comment. Il montrait
de la curiosité, de l'intérêt. Tactiquement, il voyait que je faisais parfois
l'inverse de ce qu'on a tendance à faire. Quand on mène au score, on a
tendance à vouloir faire sortir un attaquant pour faire rentrer un défenseur
mais moi j'étais plus sur l'inverse.
Razik a un projet basé sur le jeu et la possession.
Ce qui m'avait intéressé, c'était de voir son équipe jouer. Déjà en U13,
Razik avait cette volonté de faire jouer ses équipes. Ça m'avait marqué.
J'ai vu sur la chaîne de la FFF le match contre Lille à L'Etrat, ça m'a plu.
On sent que son équipe est ambitieuse et a du caractère. Elle est à son
image. Je pense aussi que le fait d'avoir été adjoint de Julien Sablé chez
les pros lui a permis de toucher du doigt les exigences du très haut niveau. Je
pense que le discours de Razik passe bien, il met beaucoup de rigueur et
d'exigence. On sent que son groupe vit bien. Je crois qu'il met de la musique
dans le vestiaire pendant les matches de championnat et de Gambardella. Razik
est un garçon intelligent qui a su évoluer. Il ne fait pas du copier-coller.
Comme je lui disais souvent, nous les entraîneurs on est tous des voleurs d'idées
mais il faut toujours garder sa personnalité. Il faut avoir des convictions.
Pas des certitudes car c'est dangereux. Parfois la limite est mince entre
convictions et certitudes. Le but c'est de toujours essayer de se remettre en
questions. Avec Razik on est resté en contacts, on discute.
Toi aussi tu es membre des Razik fans !
Je suis vraiment ravi que Razik amène les Verts au Stade de France. Je garde
d'excellents souvenirs de notre binôme. Il faisait un peu office d'adjoint avec
moi, depuis le banc il voyait des choses, c'était intéressant. C'est toujours
fructueux d'être dans l'échange et dans la concertation. Je trouvais qu'il
avait des bonnes idées, des bonnes analyses des situations. Je suis fier pour
lui, c'est un garçon travailleur et méritant qui a l'opportunité de marquer
l'histoire des Verts. Ce n'est pas donné à tout le monde, beaucoup d'entraîneurs
aimeraient être à sa place. Depuis l'époque où on a travaillé ensemble,
Razik a grandi, il a gagné en expérience et en maturité. Je lis régulièrement
ses réactions sur Poteaux Carrés, je trouve qu'il a un bon discours, une bonne
approche. Il s'exprime bien, il sait ce qu'il veut. Je sais aussi comment il
peut être dans le vestiaire avec ses jeunes. Je sais qu'il va leur donner du
plaisir. Cette aventure en Gambardella, c'est bien pour lui, c'est hyper
enrichissant. Parfois on est fait pour les jeunes, et parfois on est fait pour
les pros. Ce sont deux métiers totalement différents pour moi. A l'instant où
on se parle, je pense que Razik est vraiment fait pour les jeunes. Il a un vrai
profil de formateur, sans tomber dans la "championite" même si la
compétition est un apprentissage de la formation. Il a des convictions dans le
jeu, dans la façon dont ses joueurs évoluent. Quand on voit son équipe jouer,
on voit sa marque de fabrique. C'est bien.
Avec le recul, qu'est-ce qui prédomine : la fierté
d'avoir emmené deux années de suite les Verts au Stade de France ou la déception
d'avoir perdu ces deux finales ?
Une finale, ça se gagne. C'est l'expérience qui parle, on ne retient que les
vainqueurs. Le temps a fait que ça s'est cicatrisé. Quand t'en perds une à la
loterie des tirs au but avec en face une très belle génération monégasque -
il y avait Kurzawa, Eysseric, Ferreira Carrasco, Appiah - il y avait quand même
un sentiment de fierté. La seconde finale, contre Nice, je pense qu'on avait
moins de qualités individuelles mais un meilleur collectif. J'ai davantage éprouvé
un sentiment de culpabilité, je me suis dit que c'est peut-être moi qui avais
raté quelque chose. On est fier quand on arrive en finale, on a l'impression
que c'est un aboutissement. Mais non, l'aboutissement, c'est de gagner ! Avec le
temps, la frustration des premières années qui ont suivi s'est estompée, je
garde les bons souvenirs. Mais j'ai toujours ce sentiment d'insatisfaction,
d'avoir manqué quelque chose. Est-ce qu'il y a quelque chose que je n'ai pas
bien fait, que j'ai négligé ? Est-ce que je n'ai pas trop insisté sur des
choses trop banales ? Bien sûr, à titre personnel et avec beaucoup d'humilité,
avoir emmené deux fois de suite les Verts en finale, ça donne un sentiment
d'honneur et de fierté. Mais on est des compétiteurs, on apprend à nos gamins
à aimer gagner. Si on n'a pas gagné, c'est que quelque part je n'ai pas bien
fait les choses. Je me rends compte quand même que l'ASSE s'apprête à jouer
sa troisième finale de Gambardella en huit ans. Je crois que c'est le seul club
dans ce cas. Mais on ne retient que le vainqueur. Quand je regarde le palmarès
de la Fédé, il n'y a que le vainqueur qui est noté. Et la dernière fois que
le club a gagné la Gambardella, c'était en 1998 avec Gérard Fernandez. Tant
que t'as pas vécu la Gambardella, tu ne peux pas te rendre compte de ce que
c'est quelque part. Il faut s'imaginer : le Stade de France, c'est le panthéon
du football. Les finales des Coupes Nationales des pros se jouent là-bas, il y
a du monde en seconde mi-temps. On représente le club. Gagner là-bas ça
aurait été mieux. Mais il reste malgré tout de bons souvenirs. J'ai eu
l'occasion recroiser en Ligue 1 certains de mes anciens joueurs : Ismaël
Diomandé, Idriss Saadi, Pierre-Yves Polomat. Il reste plein de bons souvenirs
de notre parcours.
As-tu trouvé des éléments de réponses aux
questions que tu posais sur ta part de responsabilité dans ces finales perdues
? Regrettes-tu des points précis dans la préparation et la gestion de ces
matches ?
Quand tu fais des choses à l'instant T, tu penses bien faire. Puisque ça a
marché les matches d'avant, tu penses pouvoir poursuivre sur ta lancée. Je me
souviens qu'on avait terminé meilleure attaque de la Gambard', on avait tapé
l'OM à Marseille 5-2. On avait éliminé 4-1 en demi-finale à Mérignac une très
belle équipe troyenne où il y avait un certain Djibril Sidibé aujourd'hui
champion du monde. Sur l'instant, je faisais les choses car j'étais convaincu
que c'était comme ça qu'il fallait les faire. Après, avec le recul, l'âge et
l'expérience, il y a peut-être des choses que je considérerais différemment
aujourd'hui, c'est la gestion des émotions. Que ce soit les miennes, celles de
l'environnement et surtout celles des joueurs. Cette gestion des émotions est
la plus dure à maîtriser car elle n'est pas quantifiable. Comment les garçons
vont appréhender l'évènement ? En quart ou en demi-finale, tu joues pour
gagner. Mais je retiens qu'en finale tu joues pour ne pas perdre. Ce match-là
est particulier, peut-être que dans ma causerie, quand j'ai dit que ce dernier
match était le plus important, j'ai donné une autre dimension. C'est la vérité
mais peut-être que dans ma communication j'aurais dû dire que c'était un
match comme les autres pour essayer, sinon d'enlever la pression parce qu'elle
existe, en tout cas de dédramatiser l'évènement. A un moment c'est de se dire
"si on gagne, tant mieux, si on perd ce n'est pas grave on a fait du bon
boulot." C'est peut-être là-dessus, sur les termes que j'ai utilisés,
"on représente le club", que j'ai donné une pression supplémentaire
à mes joueurs qui n'en avaient peut-être pas besoin.
Razik
nous a dit qu'il ne souhaitait rien changer dans ses habitudes pour préparer ce
match. Juju
a ajouté qu'il fallait faire abstraction du contexte et se focaliser sur le
plan du jeu. Pas évident pour des garçons de 17 ou 18 ans impatients de découvrir
le Stade de France...
Je rejoins à 200% ce que dit Razik, Julien a complètement raison, mais l'évènement
reste solennel. Quand des gamins pour la première fois de leur vie rentrent
dans ce stade, c'est impressionnant ! Il y a 80 000 places, ce n'est pas tous
les jours que tu évolues dans une enceinte pareille. Tu peux essayer de dédramatiser
l'évènement mais tu ne peux pas complètement faire abstraction de
l'environnement. Tu ne sais pas comment les gamins perçoivent tout ça. Chaque
gamin est différent. Il y en a qui ont beaucoup de détachement, il y en a qui
veulent endosser le costume du sauveur, du leader. Les gamins, tu ne peux pas
leur expliquer que c'est pareil. Tu as beau les prévenir, tu as beau leur
expliquer les choses, tu as beau faire des photos la veille au stade et avoir
plein d'images dans la tête... Moi j'ai vu des visages autour de moi qui
avaient changé. Au moment où on est arrivé au stade, quand on est descendu du
bus et qu'on est allé aux vestiaires, c'est l'évènement qui t'écrase, qui
est pesant. C'est la première fois qu'ils vont jouer au Stade de France. Je félicite
les gamins du parcours qu'ils ont fait et si j'ai quelque chose à leur dire,
c'est qu'ils en profitent au max. J'entendais les gamins dire "on ne va pas
perdre aujourd'hui." A un moment donné, il faut se dire "on va jouer
pour la gagner, peu importe la manière." Mais il ne faut pas que l'enjeu
tue le jeu.
Idriss Saadi nous a confié récemment que son équipe
avait été impressionnée à l'époque par le Stade de France. Il
conseille aux Verts de jouer samedi comme s'ils étaient à Aimé Jacquet.
Pas évident...
Facile à dire. Le Stade de France, c'est le panthéon du football, c'est
extraordinaire. Quand tu démarres la compétition, rien qu'avec les U19
nationaux, il y a déjà 56 équipes au démarrage. Quand tu te qualifies pour
la finale, t'arrives dans un stade où il y a une histoire. Le stade où se
jouent les finales de Coupe de France et de Coupe de la Ligue. Le stade où la
France a été sacrée championne du monde en 1998. Bien sûr les gamins qui
joueront n'étaient pas nés à l'époque, les plus vieux comme Kenny ou Charles
Abi sont des 2000. Mais tous les U19 savent que ce stade a une histoire. Comme
dit Idriss, il faut essayer de jouer comme si tu jouais dans tes repères
habituels. Sauf que tu ne peux pas. Je comprends ce qu'il veut dire mais ce
n'est pas possible. Tu cherches ta famille au deuxième ou au troisième niveau,
t'as l'impression qu'elle est loin. Il faut peut-être essayer de faire
abstraction de tout ça mais il n'y a pas de recette magique ! La deuxième
finale, derrière l'OL jouait contre Quevilly. Les supporters lyonnais nous ont
hués, ce n'était pas prévu !
Un peu quand même, non ? Je crois qu'ils ne nous
aiment pas et on le leur rend bien.
(Rires) Oui mais ce que je veux dire c'est que t'as déjà un adversaire sur le
terrain, et un autre dans les tribunes. Heureusement le public de Quevilly avait
pris parti pour nous mais c'est quand même très particulier en termes
d'ambiance une finale de Coupe Gambardella. Mais c'est une expérience super
enrichissante. Une finale de Gambardella, ça remplace une ou deux années de
championnat U19 juste sur un match en termes de pression et d'impact mental. Même
moi je l'ai ressenti comme ça. Émotionnellement, il ne faut pas subir l'évènement.
D'une certaine façon t'es obligé de le subir mais il faut résister à tout ça.
Quand tu commences le match, le stade est vide. Et petit à petit ça se
remplit, ça se met à gronder, ça applaudit. Le fait que les supporters de
Paris ou de Rennes prennent parti pour une équipe, ça peut un peu changer la
donne. Quand la tribune derrière les buts est à moitié remplie, ce n'est pas
la même chose que quand elle est vide.
On peut pas essayer de faire fi de cet environnement
?
Avec le recul que j'ai de ces deux finales, c'est tout cet environnement que tu
ne peux pas maîtriser. Tu peux essayer de canaliser certaines choses mais il y
a un environnement qui te dépasse. Le tout est d'appréhender les choses de la
meilleure des manières. C'est peut-être pour ça qu'il ne faut pas trop
insister sur certaines choses. Faut-il dire aux gamins "attention, peut-être
qu'en deuxième mi-temps il va y voir du monde" ? Non, peut-être qu'il ne
faut pas aborder ces sujets-là. J'ai aussi conseillé à Razik de bien
anticiper la problématique de la billetterie. La première finale surtout, les
gamins pensaient plus même à l'échauffement de s'assurer que leur famille était
bien dans les gradins. A un moment on rentre dans les vestiaires et je vois les
gamins en train de textoter. Je me suis un peu fâché. Ils étaient inquiets de
savoir si leurs proches avaient bien récupéré les places. Ce sont des petits
détails mais l'idéal est de faire en sorte que les garçons soient dans une
bulle, hermétiques, et qu'ils se concentrent sur un objectif commun, où tout
le monde doit converger : gagner. Même le discours des dirigeants et de l'entraîneur
des pros va être important. Je me souviens que Roland Romeyer était venu dans
le bus, il avait dit des mots et je trouvais sur le moment que c'était bien.
Mais avec le recul je me dis que les gamins sont partis en se disant : "on
est les porte-drapeau du club, tout le monde attend qu'on gagne." Alors
c'est sûr que c'est valorisant, tout le monde parle de nous, le président
vient, c'est solennel comme mouvement. Mais les garçons sont partis avec le sac
à dos rempli. Peut-être que la veille du match il ne faut pas faire d'entraînement
trop long, aller au ciné, faire quelque chose qui sort de l'ordinaire. Mais si
j'avais fait ça et qu'on avait perdu, je le serais dit "j'aurais dû faire
comme j'ai l'habitude de faire."
Ces deux finales ne se sont pas joué à grand
chose...
Les finales se jouent très souvent sur des petits détails. La seconde me
laisse un peu plus d'amertume car je ne sais pas si sur le ballon est renté ou
pas sur l'ouverture du score niçoise. Autant contre Monaco on a fait ce qu'il
fallait, il y a un penalty qui aurait pu être sifflé à la fin, un tirage de
maillot sur Bilel Aouacheria mais on est tombé sur une belle équipe, à la fin
on a perdu à la loterie des tirs au but. La deuxième finale, j'ai plus de mal
à l'encaisser. Si on avait perdu 3-0 ou 4-0, je me serais dit "aucun
regret, on a perdu contre plus fort que nous." Mais avait battu Nice en
championnat deux fois, on les avait toujours dominés. Peut-être qu'on s'est
dit qu'on allait jouer de la même manière alors que Nice s'est dit "on
n'a rien à perdre." On a fait une très belle deuxième mi-temps mais le
mal était fait, c'est dommage.
Ces deux générations de finalistes ne sont-elles
pas globalement décevantes ? Le seul titulaire indiscutable cette saison en L1,
c'est Ruben Aguilar, auquel l'ASSE n'avait même pas proposé de contrat pro...
C'est vrai mais Ismaël Diomandé a quand même été titularisé une quinzaine
de fois en L1 cette saison à Caen, Pierre-Yves Polomat a gratté du temps de
jeu à Sainté. Il y a aussi des garçons dont la progression a été entravée
par des blessures. Je pense bien sûr à Idriss Saadi, qui s'est blessé sérieusement
à Strasbourg, mais aussi à Kévin Mayi, qui joue à Brest, un club bien parti
pour monter en L1. Bilel Aouacheria, qui comme Kévin et Polo a joué les deux
finales de Gambardella, compte une trentaine de titularisations depuis qu'il a
rejoint Moreirense, l'actuel cinquième du championnat portugais. Et bien évidemment
Kurt Zouma a beaucoup de temps de jeu et fait une belle saison avec Everton, il
a d'ailleurs été rappelé dernièrement en équipe de France.
D'autres joueurs ont eu du temps de jeu en Ligue 2
ou des "petits" championnats étrangers.
Oui, je pense à Jérémy Vachoux, qui a beaucoup joué la saison passée à
Lens, ou encore à Ben Kamaroko, qui joue en D1 norvégienne. David Douline a
joué à Clermont la saison passée et vient de faire une belle saison à Rodez,
promu en L2. Pierrick Cros a joué deux saisons en L2 au Red Star. Kamel Chergui
a joué un petit peu en L2 avec Châteauroux. Florian Milla a joué en L1 tchèque.
En fait on se rend compte chaque année en Gambardella que parmi les finalistes
t'as que quelques joueurs qui arrivent à vraiment s'imposer chez les pros. Pour
s'imposer dans un club comme Sainté, qui joue le top 5 voire le podium en L1,
il faut faut vraiment être costaud et avoir un sacré niveau ! Il n'y a que le
petit Saliba pour l'instant en L1 alors que les Verts vivent une belle épopée
en Gambardella. J'ai vu que l'ASSE a fait signer pro énormément de jeunes,
mais c'est plus pour protéger des jeunes talents en devenir que parce qu'ils le
méritent. A une époque on faisait signer en pro des stagiaires qui avaient déjà
fait des bancs et des entrées en jeu en pro, des talents à la Kurt Zouma ou à
la Allan Saint-Maximin.
Tu n'es pas un peu déçu de voir que des garçons
comme Maxence Chapuis, Pierrick Cros, Kamel Chergui, Florian Milla et Jessim
Mahaya jouent "seulement" en National 2 vu le potentiel qu'ils avaient
laissé entrevoir en U19 ?
Le football amateur, le "football d'en bas" et il n'y a rien de péjoratif
quand je dis ça, s'est amélioré. Ce n'est pas parce que tu ne signes pas pro
dans ton club formateur ou seulement un contrat d'un an non renouvelé que t'es
un mauvais joueur. Pour moi, faire quatre ou cinq ans dans un centre de
formation c'est déjà un gage de réussite. Cela prouve que le recrutement a été
bon, que la continuité du travail a été faite. La durée montre que le joueur
avait de la qualité. Mais ensuite il y a l'exigence du haut voire du très haut
niveau. Quand je vois jouer Saint-Etienne avec les Rémy Cabella, Wahbi Khazri,
Yann M'Vila, Romain Hamouma, Youssef Aït Bennasser, Timothée Kolodziejczak..
Faut s'accrocher pour les déloger et prendre leur place ! Faut y aller quand même,
y'a du lourd ! Pour en revenir à la Gambard, il ne faut pas oublier que ce ne
sont que des ados, quelques uns s'imposeront chez les pros, certains feront des
parcours très honorables au niveau amateur. Qu'ils gagnent où ils perdent la
finale samedi, ils garderont de bons souvenirs de leur parcours. Bien sûr ils
seront meilleurs s'ils soulèvent la Coupe. Pour les nombreux 2001 de l'équipe
de Razik, soit ils la gagnent, soit c'est fini car la saison prochaine seuls les
U19 première année auront le doit de disputer cette compétition.
En quoi la Gambardella est-elle une compétition à
part chez les jeunes ? Comment expliques-tu qu'elle soit plus valorisée qu'un
titre de champion de France U17 ou U19 par exemple ?
Je pars du principe que, quelle que soit la compétition, il faut gagner. Il ne
faut pas minimiser les titres de champion de France chez les jeunes, l'ASSE
avait d’ailleurs réussi à en décocher un il y a six ans avec les U17
nationaux entraînés par Gilles Rodriguez et Lionel Vaillant. Ce qui est intéressant
sur les championnats, c'est que c'est sur du moyen terme - long terme. Mais dans
les championnats, tu ne mets pas tes meilleurs joueurs. Les meilleurs U19 ne
jouent pas en championnat des U19 nationaux mais en réserve. Les meilleurs éléments
du centre de formation s'entraînent avec les pros, font des bancs en Ligue 1.
Aujourd'hui les championnats ne sont pas très révélateurs de la santé d'un
centre de formation, en tout cas de la qualité des joueurs qui sont en centre
de formation. La Gambardella par contre, c'est là où tu mets tous tes
meilleurs éléments, tes meilleurs joueurs. C'est la compétition dans toute sa
splendeur. Tu gagnes ou tu perds, tu passes ou t'es éliminé. Plus tu avances
dans la compétition, plus ça devient intéressant et plus tu te rends compte
de la dimension qu'elle est en train de prendre. Tu te dis : "on n'est plus
qu'à trois matches du Stade de France", "on n'est plus qu'à deux
matches", "on n'est plus qu'à un match". Et quand t'y es, le
plus gros des matches c'est celui-là ! Parfois le match, tu ne te le fais pas
contre l'adversaire, tu le fais contre toi-même. Comment tu vas faire pour ne
pas changer ta façon de jouer, sans pression. Tu joues des matches couperets
alors qu'un championnat, tu perds, tu peux te rattraper. La Gambardella, c'est
la compétition des clubs, c'est la vitrine. Si tu gagnes la Gambardella, on dit
que t'as un super centre de formation. Il ne faut pas dénigrer le championnat
U19 mais tu ne mets pas tes meilleurs éléments dans ce championnat.
La Gambardella permet aussi de se frotter à des équipes
qu'on n'affronte pas habituellement.
Tout à fait, c'est hyper intéressant de se jauger avec des équipes de divers
horizons. A cet égard la finale fera office d'exception car Sainté et Toulouse
sont depuis pas mal d'années dans le même groupe en championnat. Mais les
tours précédents, les Verts ont affronté d'autres bons clubs formateurs comme
Sochaux, Auxerre, Nantes, Lille, Bordeaux. La Gambardella, c'est aussi la petite
sœur de la Coupe de France. Les premiers tours, les clubs amateurs y
participent. Et quand tu tombes sur eux, tu joues chez eux. Tu joues parfois sur
des terrains pas évidents, il y a parfois des traquenards. Comme la Coupe de
France, la Gambardella réserve son lot de surprises. Les Verts ont évité
qu'il y en ait une dès son entrée en lice, elle a dû batailler pour
l'emporter sur le terrain du FC Lyon, un bon club régional qui leur a donné du
fil à retordre. Et comme en Coupe de France, il y a de belles histoires, des
retournements de situation. A Auxerre la situation était bien mal embarquée,
les Verts jouaient à dix et ils étaient menés 3-1 à quelques minutes de la
fin. Ce jour-là les garçons de Razik Nedder ont fait un exploit. Je crois que
c'était un match charnière. Cette équipe, qui a du potentiel, a aussi montré
ce jour-là de la solidarité et de la cohésion. Ce que je retrouve
regrettable, quand tu as utilisé 20 ou 22 joueurs sur toute la compétition,
c'est que tu sois obligé de n'en prendre que 16 pour la finale. T'es obligé de
trancher, et c'est difficile de le faire car tu sais que tu vas faire plusieurs
malheureux. Je trouve que la Fédé devrait autoriser un plus grand nombre de
remplaçants.
William Saliba jouera très certainement contre
Toulouse ce week-end. En finale de Gambardella le samedi ou en L1 le dimanche ?
Je sais que Saint-Etienne a une priorité, la course à l'Europe donc le
championnat. Je ne serais pas surpris que les Verts jouent à guichets fermés
dimanche après-midi car ils ne sont pas très loin de la troisième place
qualificative pour le tour préliminaire de Ligue des Champions. Après, je ne
suis pas à la place de Jean-Louis Gasset. C'est une décision du club, qui doit
venir de l'entraîneur des pros. Si Timothée Kolodziejczak n'était pas
suspendu, il aurait pu jouer avec Loïc dans l'axe avec Polo latéral gauche.
Parfois on peut essayer de jouer sur deux tableaux, mais il peut arriver alors
qu'on perde sur les deux. Si Saliba ne joue pas en Gambardella, Razik trouvera
une solution. Il met à juste titre en avant la notion de groupe et dispose
d'autres joueurs qui ont démontré leurs qualités à ce poste lors des tours
précédents. Contre Lille, il a fait jouer Tshibuabua et Halaimia, contre
Bordeaux il y avait Fofana à côté de Saliba. Je suis convaincu que l'ASSE
saura prendre la meilleure décision. Moi à l'époque j'aurais aimé avoir Kurt
Zouma et Allan Saint-Maximin contre Nice. Peut-être qu'on aurait gagné... mais
peut-être qu'on aurait perdu quand même ! Christophe Galtier avait besoin de
ces deux joueurs, il est venu me voir, ça s'est passé en toute tranquillité,
dans la sérénité. C'est l'entraîneur des pros qui décide, c'est normal. La
priorité des priorité, c'est les pros ! Que Saliba soit là ou pas samedi, la
finale ne se résume pas à lui, ce sera la victoire d'un groupe.
La finale de Gambardella sera l'occasion pour les médias
de mettre un coup de projecteur sur la formation de l'ASSE. Elle vaut bien mieux
que la 20e place du dernier classement des centres, non ?
Oui. Le classement des centres, il faut en avoir deux lectures. Si on n'a qu'une
première lecture brutale, terre à terre, tu te dis que la 20e place est
significative. Oui et non en fait. Il y a des critères d'efficacité, avec
dedans les sélections en jeunes, les participations aux matches pros des
jeunes, le nombre de contrats pros signés, plus la scolarité et le niveau de
diplôme des éducateurs. Le PSG aujourd'hui, pour moi c'est le plus grand club
formateur d'Europe. Le nombre de joueurs parisiens qu'on peut retrouver en L1 ou
dans le top 5 européen, c'est énorme ! Mais est-ce que le PSG a gagné la
Gambardella ces dernières années ? Est-ce qu'ils vont toujours loin ? Non.
Monaco l'a gagné avec Mbappé car ils avaient le joueur "plus", mais
ils ne vont pas toujours très loin.
Les vilains non plus...
Lyon est aussi l'un des meilleurs clubs formateurs, ça fait longtemps qu'ils
n'ont pas fait une finale. La Gambardella peut montrer une qualité de ta
formation mais elle ne dit pas tout de ta formation. Quel est le projet club,
est-ce que les meilleurs joueurs montent en réserve et en pro et quelque par la
Gambard passe au second plan... il y a plusieurs façons de voir les choses.
Pour les supporters, c'est bien car ça va donner du grain à moudre. Moi je me
souviens qu'à l'époque des supporters m’interpelaient en me disant :
"Vous allez en finale mais il n'y pas de jeunes qui jouent en pro !"
Mais il a l'époque ce n'était pas évident de rentrer dans l'équipe de
Christophe Galtier qui se bagarrait pour décrocher une place en Coupe d'Europe.
A Angers on a beaucoup de 2000 et de 2001 qui s'entraînent avec les pros, on
s'est fait éliminer au premier tour de la Gambard'. Est-ce à dire qu'on est un
mauvais centre de formation ? Je ne pense pas. Mais la finale de Gambardella va
donner un coup de projecteur sur les Verts, je trouve ça bien car il faut
saluer le travail qui est fait à l'ASSE, pas que cette année mais aussi des
années précédentes. Il y a un travail de fond qui est entrepris à Sainté,
un projet de formation, un projet club.
En tant que directeur de centre de formation du SCO,
partages-tu la vision des responsables de la formation stéphanoise ?
Il y a bien sûr des dénominateurs communs. Comme vous l'a rappelé récemment
Razik, un centre de formation travaille au service des pros. Moi aussi, c'est ce
qui m'importe ; aujourd'hui, on doit alimenter les pros avec des jeunes joueurs
de talent. Ensuite, on connaît tous la statistique : il n'y a que 2% des
joueurs formés qui deviennent pros. Cela montre la difficulté, on est dans un
système très élitiste. C'est aussi pour ça que l'on forme des hommes, pas
que des joueurs. Mais le centre que je dirige est beaucoup plus jeune que celui
de l'ASSE. Nous à Angers, on a que six ans d'ancienneté. A Sainté, ça se
compte en décennies. Le temps est incompressible, le temps d'avance qu'à
Saint-Etienne, je ne pourrai jamais le rattraper. Ensuite chaque centre a ses spécificités,
ses modes de fonctionnement en fonction des ressources dont il dispose. Il nous
arrive d'échanger entre directeurs de centre, c'est toujours intéressant.
Tu le fais notamment avec ton homologue stéphanois
Philippe Guillemet je présume !
Bien sûr, j'échange avec Philippe, qui s'occupait des U15 et de la préformation
à l'époque où j'étais à l'ASSE. Moi je suis encore entraîneur, je m'occupe
de la réserve en plus du centre car j'aime le terrain. Philippe a une autre
position, il est "au-dessus de la mêlée." Quand je discute avec lui,
je me rends compte qu'on a des problématiques communes : les comportements des
jeunes, des ados, sont les mêmes qu'ils soient à Sainté ou à Angers.
L'environnement familial, les agents et pseudo-agents, c'est pareil. Les
agressions des pays européens, nos petits voisins espagnols, anglais,
allemands, italiens qui veulent piquer nos jeunes, on a tous ces mêmes problématiques,
sauf qu'elles se resituent dans l'environnement propre du club. Saint-Etienne
doit composer avec la rivalité du voisin lyonnais. Dans ma région, nos rivaux
sont Nantes, Rennes, Lorient. A mon sens le fond des problématiques est le même,
les formes divergent. Saint-Etienne par exemple a tendance à faire signer énormément
de jeunes pros, même ceux qui n'ont pas encore goûté aux pros. On a été récemment
en séminaire en Allemagne, ce qui se fait là-bas est intéressant. Mais
franchement, ce que l'on fait chez nous, c'est quand même pas trop mal.
Pourquoi les grands championnats viennent prendre nos meilleurs jeunes ? Parce
qu'il y a un savoir-faire français. Il faut être fier de ça ! Il faut le
revendiquer. Les clubs se donnent les moyens de bien travailler la formation sur
les plans structurels et humains. D'un club à autre, les dimensions sont différentes.
L'ASSE n'est pas le SCO, le SCO n'est pas l'OL. Les profils de joueurs que l'on
peut recruter les uns et les autres sont complètement différents. Moi je suis
plus sur la proximité et la régionalisation, alors qu'aujourd'hui
Saint-Etienne est plus sur du national et de l'international. A Angers on est un
tout petit centre de formation et notre budget est en corrélation avec celui de
l'équipe première. On a le 19e budget de Ligue 1, mais au SCO la formation a
toute sa place en tout cas dans le projet du club. L'ASSE aujourd'hui se donne
plus les moyens d'enrôler des joueurs plus expérimentés ayant une certaine
valeur sur le marché pour essayer d'accrocher le top 4. Comme l'exigence du
club monte, il faut que l'exigence des jeunes qui arrivent en-dessous soit
optimale, qu'ils aient un gros talent.
Abdel Bouhazama revient sur son aventure en Coupe Gambardella(Source : Poteaux Carrés, 23 avril 2019)
Après s'être longuement confié pour nous hier sur notre site, Abdel Bouhazama revient plus brièvement sur son aventure en Gambardella dans la dernière édition du Progrès. Extraits.
"Souvent, les joueurs pros retiennent leur parcours en Gambardella. On a toujours une sorte de totem. Dans la cohésion de groupe, c’est quelque chose de très fort. On a vécu une vraie aventure humaine. Je suis encore en contact avec quasiment tous les joueurs. Aujourd’hui, ils m’envoient des maillots et sont pour certains des pères de famille. J’ai trois enfants mais, eux aussi, ce sont mes petits. Les défaites au stade de France ont fait qu’on est resté unis pour mettre des pansements sur les plaies.
J’ai juste eu la chance d’avoir été l’entraîneur de cette génération-là. C’est le travail de tout un club : des recruteurs, du centre de formation, des cuisiniers. Moi, j’ai juste été là au bon endroit, au bon moment. J’étais le porte-drapeau du club. Avoir vécu ça avec les jeunes, c’est un sentiment de fierté. Mais la réussite quand vous êtes formateur, c’est de former des joueurs de très haut niveau : Zouma, Polomat, Diomandé, Saadi et d’autres qui jouent en National par exemple. Cela montre toujours la bonne santé d’un centre de formation.
Lors de la première finale en 2011, j’avais dit à mes garçons : " On ne va pas à Walt Disney ". Quand on est rentré dans le vestiaire, puis qu’on a pénétré sur la pelouse avant le match, tout le monde a sorti son appareil photo. On a fait une photo de famille. Par moments, on peut oublier qu’on y va aussi pour jouer un match de football. Ces instants sont tellement rares et privilégiés. Il faut apprécier chaque moment. Mais quand le match commence, il faut faire abstraction de tout le reste, oublier la famille dans les tribunes, même si cela est difficile. On joue pour le club et gagner le match. "
Abdel Bouhazama dévoile sa politique de recrutement (Source : Poteaux Carrés, 25 juin 2019)
Ancien entraîneur des U19 et actuel directeur du centre de formation du SCO, Abdel Bouhazama dévoile sa politique de recrutement dans la dernière édition du Progrès. Extraits.
"Le but est de recruter des joueurs du bassin angevin essentiellement, puis dans un second temps dans la région parisienne qui est à deux heures d’Angers. Cela facilite l’attachement au club, et évite un déracinement trop fort de l’enfant. En tant que père de famille, il m’arrive souvent de réfléchir comme un parent de joueur, et d’imaginer à quel point c’est un moment difficile. Quoi qu’on en dise, quand un jeune a un club pro dans sa région, il a envie de réussir, parce qu’il y a la famille et les copains derrière. Il y a un sentiment de fierté et de réussite locale. Avoir cette image de réussite et proximité fait que certains agents pensent que c’est plus sain que leurs joueurs viennent chez nous. Dans un club comme le nôtre, il n’y a que trente couchages au centre, cela veut dire que notre recherche doit être d’autant plus pertinente, alors que le taux de réussite au niveau professionnel est de 2 % selon la DTN, c’est infime !"
Abdel Bouhazama fait du bon boulot au SCO (Source : Poteaux Carrés, 17 octobre 2019)
Directeur du centre de formation du SCO d'Angers, l'ancien entraîneur des U19 stéphanois Abdel Bouhazama se confie aujourd'hui dans Ouest-France. Extraits.
"Promue en National 2, notre réserve est cinquième de son groupe. Les U19 sont premiers, les U17 sixièmes. Ça montre la bonne santé du centre. On est dans la même dynamique que les pros. A seulement 18 ans, Rayan Aït-Nouri est titulaire en L1 et surclassé en équipe de France Espoirs. Waniss Taïbi va disputer le Mondial U17 avec l'équipe de France.L'apparition de nos jeunes dans le groupe de Stéphane Moulin est un vrai indicateur. C'est ce qui nous permet de voir qu'il y a de la qualité. Alimenter le groupe pro en jeunes, c'est notre objectif principal. On le fait plutôt bien depuis 2-3 ans.
Au début, on faisait un recrutement sauvage. On faisait venir 40 joueurs en adéquation avec notre recrutement et on les testait. Parfois, le recrutement se faisait sur CV. Aujourd'hui, on est plus exigeant, on cible beaucoup mieux. Aucun joueur ne signe s'il n'a pas été supervisé et si on ne l'a pas vu en vidéo. On base notre recrutement sur une politique de proximité. Pour qu'on aille chercher un joueur plus loin, il faut que celui-ci soit vraiment plus performant que ce qu'on a chez nous. À l'image de Waniss Taïbi, qui vient de Limoges ou Rayan Aït-Nouri, du Paris FC.
Les parents ne sont pas insensibles à ce qu'on propose. Ils sentent de la sérénité chez nous. Dans le meilleur des cas, seulement deux joueurs sur cent passent le cap du professionnalisme. Que propose-t-on aux 98 autres ? On fait attention aux joueurs, on les accompagne. Voir un garçon faire cinq ans au centre de formation, l'emmener jusqu'à la réserve, même s'il ne signe pas de contrat pro, c'est une réussite. Car on l'a fait grandir sur le plan footballistique mais aussi sur le plan humain."